La Titrologie du roman selon la théorie de Claude Duchet (Le cas d’étude : Au revoir là-haut)

Type de document : Original Article

Auteurs

1 Département de langue française, Branche Machhad, Université Azad islamique. Machhad, Iran

2 Maitre de conference Departement de droit et de langues etrangeres, Branche Mashhad, Universite Azad islamique , Mashhad, Iran.

Résumé

Comme il est évident que tout le titre donne des informations à propos de son contenu. Le titre du roman joue un rôle très important pour attirer les attentions des lecteurs. L’un des sujets de recherche importants à cet égard est la titrologie ; donc, dans cette écriture scientifique, nous allons étudier les aspects littéraires et sociaux du titre du roman Au revoir là-haut du point de vue sociocritique et en base de la théorie de Claude Duchet d'une manière bibliographique et analytique. Le roman Au revoir là-haut a traité le sujet de la grande guerre mondiale. L’auteur choisit un titre qui évoque la lettre d’un soldat français à son épouse, au nom de Jean Blanchard, au début de la première guerre mondiale. En étudiant chaque œuvre littéraire, Claude Duchet estime qu'il faut étudier et analyser les différentes fonctions qui se concentrent sur l’objet, le destinataire et le message. Selon ce penseur contemporain, chaque titre est porteur d'un message littéraire et social à la fois. Nous allons répondre à cette question fondamentale : comment le social est intégré dans le titre du roman Au revoir là-haut de Lemaître ? L'étude sur des titres des chapitres, de la première page et du roman ainsi que la couverture sont également étudiés dans le domaine de la titrologie.

Mots clés

Sujets principaux


Introduction

Vu qu’il existe une relation étroite entre la littérature et la société, nous pouvons considérer les textes littéraires, y compris le roman, comme un miroir de la société. De nombreux chercheurs ont fait des recherches sur les textes littéraires du point de vue social. Bien que les grands chercheurs comme Georg Lukács et Lucien Goldmann aient déjà fait des recherches dans le domaine de la sociologie de la littérature, c’est Claude Duchet qui a présenté l’idée de la sociocritique en 1970 pour la première fois. Il faudrait préciser qu’au contraire de la sociologie de la littérature, la sociocritique se concentre sur le texte et à travers le texte ; ainsi le chercheur doit-il découvrir et repérer le social intégré dans le roman. D’après cette approche de Duchet, on pourra étudier les différents enjeux concernant la socialité des textes littéraires, dont un des plus importants est la titrologie. A noter que, comme le titre de chaque produit révèle son contenu, le titre du roman annonce aussi le sujet et le thème ; autrement dit, le titre joue un rôle primordial à attirer attention des lecteurs. Il arrive largement que des gens choisissent et achètent un roman, uniquement pour le titre.

Étant donné que le titre donne peu d’informations sur le contenu d’un roman, il faudrait encourager les lecteurs à le choisir et à le lire, car les informations partagées par le titre sont parfois entièrement incorrectes, de temps à autre. Le titre se résume aux noms des héros ; occasionnellement, le titre dévoilerait que la fiction concerne probablement à un fait réel. Par exemple, Le Rouge et le Noir, ressemble plutôt à une énigme et évoque implicitement les évènements autour de la guerre. Un autre exemple Lettres de deux amants qui évoque des romans épistolaires.

D’une manière générale, le titre se trouve au premier plan de tout texte, et puisque de nos jours, le public est si pressé, le choix du titre est donc très important car il aboutit à la lecture du roman par le public.

Tout au long de cette recherche, profitant de la méthodologie de Claude Duchet, nous allons révéler l’aspect social du titre du roman mentionné, Au revoir là-haut de Pierre Lemaître qui l’a rédigé en 2013. Duchet, lui-même, a fait des recherches sociocritiques sur les titres de plusieurs romans comme ceux de Balzac, de Zola et de Stendhal. Vu que ce roman a obtenu plusieurs prix littéraires, y compris Prix Goncourt, le plus grand prix littéraire en France, et qu’il est connu comme un roman anti-guerre, nous essayons d’analyser et de faire une étude sociocritique sur son titre, selon la théorie de Duchet.

Au cours de cet article, nous envisageons d’abord d’étudier le cadre technique proposé par Claude Duchet, ensuite nous allons découvrir les aspects littéraires et sociaux du titre du roman de Lemaître. Car Duchet ayant présenté les fonctions pour identifier le type du titre, explique comment les sous-titres et la page du titre effectuent un choix aux lecteurs. Du fait, Duchet présente les modalités pour découvrir l’idéologie de l’auteur.

Dans la presse écrite, le titre joue un rôle important, mais dans le domaine littéraire, peu de chercheurs s’y sont véritablement intéressés. A rappeler que Gérard Genette, lui aussi, a travaillé sur les titres :

« Gérard Genette a expliqué la notion de paratexte qui réunit justement tous les ensembles discursifs – mais aussi des unités non verbales, comme les illustrations des couvertures de livres – qui entourent un texte littéraire ou qui s’y rapportent. Le paratexte accompagne l’œuvre, en quelque sorte, pouvant ainsi en encourager ou même en faciliter la lecture. Une distinction entre les éléments du paratexte interne et externe – par rapport au texte évidemment – conduit à deux autres notions : le péritexte et l’épitexte. Rappelons simplement que le titre, la préface et la couverture du livre font partie du péritexte » (Roy, 2008 : 3).

 

Duchet, ayant systématiquement abordé le sujet du titre, présente une méthode pour découvrir le social du titre. Dans cette recherche, nous allons avoir pour le but d’étudier le titre du roman Au revoir là-haut du point de vue sociocritique selon la théorie de Claude Duchet qui est connu en tant que l’inventeur du concept la sociocritique en 1970. Comme déjà expliqué, celui-ci étudie le texte littéraire et découvre le social intégré dans le texte. Et tout en recourant à son approche sociocritique, nous chercherons à appréhender le réel social intégré dans le titre Au revoir là-haut de Pierre Lemaître. En effet, nous allons répondre à cette question fondamentale : Comment le social est intégré dans le titre du roman Au revoir là-haut de Lemaître ?

 

Un regard bref sur la titrologie

Pour donner une définition de la sociocritique, nous citons une phrase de Claude Duchet comme l’inventeur de cette conception, au long d’un entretien avec Ruth Amossy :

« La sociocritique n’est pas une sociologie de la littérature et elle n’a pas seulement la littérature pour objet mais tous les ensembles socio-sémiotiques. Si elle privilégie la littérature dans ses études des phénomènes sociogrammatiques, c’est parce que la littérature en offre les états et les modes les plus complexes, donc présente plus de résistances à l’analyse sociocritique. Mais l’objectif de la sociocritique est l’étude socio-historique des représentations. La notion d’historicité est pour elle fondamentale » (Amossy, 2005 : 132).

 Le lecteur, avant de lire un roman, comme déjà-dit, inspire certaines informations à ce sujet, par le titre, peu importe si c’est correct ou incorrect, mais, par le titre, il attend savoir sur ce qui est déjà prédit. Parfois, il comprend le sens strict du titre après avoir terminé sa lecture. Duchet (1971) a expliqué son propos ainsi : « un territoire se définit par des frontières : celles du texte sont mouvantes ».

Dans le cas d’un roman, le titre, la première et la dernière phrase sont tout au plus des repères entre texte et hors-texte. En fait, jaquette et couverture ont déjà parlé le texte, déjà situé son contenu et son mode d’écriture (Duchet, 1971 : 6). Le titre d’un roman joue un rôle majeur dans l’accueil des lecteurs. « En effet, le lecteur est frappé dès le premier regard par le titre du roman, qui est écrit en grandes lettres capitales et disposé de manière à attirer son attention » (Belkhous, 2016 : 27).

Certains chercheurs ont présenté les catégories pour les titres : référentiels, passionnants, persuasifs, questionnaires, titres double et ainsi de suite. Ce qui est important, c’est que dans les journaux, le titre doit indiquer le résumé de l’article avec précision et clarté, et le premier objectif du titre est donc d’informer le lecteur du contenu exact de l’article ; mais en ce qui concerne les romans, nous ne pouvons jamais réclamer les caractéristiques absolues et définies.

En général, les titres pourraient être divisés en quatre types :

  1. Littéral (Les Liaisons dangereuses, par de Laclos, qui renvoie au sujet central),
  2. Métonymique (Le Père Goriot, par Balzac, qui renvoie à un personnage secondaire de l’histoire),
  3. Métaphorique (Voyage au Bout de la Nuit, par Céline, qui décrit le contenu du texte de façon symbolique),
  4. Antiphrastique (La Joie de Vivre, par Zola, qui présente ironiquement le contenu du roman, où le protagoniste est obsédé par la mort).

L’auteur donne un schéma de son univers qui a été reproduit dans son roman par le choix d’un titre qui est « pris comme un objet en soi, se lit d’un bout à l’autre avec un intérêt soutenu : il ouvre, précisément, mainte perspective nouvelle à la réflexion du lecteur épris de littérature » (Bardel, 1989 : 212). Ainsi faut-il démontrer le rôle important de cet élément essentiel et paratextuel, le titre, dans le roman Au revoir là-haut à découvrir le réel social.

La mise en relief des mots est une façon pour effectuer le lecteur. Pierre Lemaître en évoquant un évènement patriotique, met en évidence le terme « Au revoir là-haut ». Nous menons une étude sémantique sur le titre afin de découvrir les façons de distinguer les mots qui déclarent le sujet du roman.

 

Le cadre titrologique de Duchet

Lexicalement, tous les mots de titre et de sous-titre ainsi que de la page de titre n’ont pas la même valeur sémantique et de lisibilité ; certains sont plus importants que le reste. Claude Duchet, en tant qu’inventeur de la sociocritique, croit à deux aspects littéraire et social dans le titre et pour le découvrir, il propose d’étudier trois fonctions de référentielle (centrée sur l’objet), conative (centrée sur le destinataire) et poétique (centrée sur le message). Le sens du titre est parfois caché et pour le comprendre, il faudrait chercher dans le monde réel et en dehors du texte. Il propose trois éléments essentiels pour le titre, respectivement : attirer, retenir et provoquer et aussi « une teneur connotative » consacré au roman. Le titre est en effet un message codé contenant la littérarité et la socialité.

Duchet rédige dans son article concernant la titrologie : « C’est en fonction des tensions historiques, par différences ou oppositions, ou à l’inverse par ressemblances plus ou moins affichées, qu’un ensemble de titres chronologiquement situé à quelque chance de produire un sens, et de fournir des matériaux pertinents à une lecture sémantique» (Duchet,1973 : 60). Il pose la fonction conative du titre qui se situe sur le destinataire ; de même, le lecteur en lisant le titre, imagine un évènement à venir dans le roman puis par son propre inspiration est séduit ; ce qui est compris du concept du titre c’est exactement celui qui l’attire. Les titres des chapitres et intertitres aident bien à sa compréhension. De même, parfois, le titre trompe les lecteurs, mais la couverture de livre est adjuvant pour mieux comprendre. « C’est sur le titre que repose le succès immédiat de l’œuvre. L’ambiguïté, l’incomplétude, l’énigme, les figures de style, sont autant de procédés mis en œuvre afin de séduire le lecteur et le convaincre de lire. Enfin, il peut s’avérer positive, négative ou nulle selon les récepteurs » (Benmerikhi, 2004-2005 :44).

Selon Duchet, l’attention du lecteur est concentrée sur le sens du titre dans lequel sont cachés les secrets littéraires. Chaque titre englobe les concepts idéologiques de l’écrivain. Claude Duchet explique son idée ainsi :

« Le but d’un texte n’est pas sa fin, mais l’attente de sa lecture, le début de son pourquoi, de son vers quoi. Au bout de la Recherche, la recherche commence, « dans le temps », et le roman se recommence. C’est l’autre seuil du texte, un instant de vérité où il se déclare… Mais le début d’un texte n’est pas non plus son commencement : un texte ne commence jamais, il a toujours commencé avant » (Duchet, 1971 : 8).

Dans la sociocritique duchetienne, la littérarité et la socialité du titre sont étudiées. Il écrit dans un de ses articles ainsi : « où se définissent les conditions de communication, où se mêlent deux séries de codes : le code social, dans son aspect publicitaire, et les codes producteurs ou régulateurs du texte » (Duchet,1973 : 56). Autrement dit, l’auteur a choisi le titre esthétique mais, en même temps, il existe la socialité cachée qui révèle l’opinion de l’écrivain.

 En bref, « quand le titre désigne l’objet du roman, quand il joue le jeu de sa référentialité, son sens n’est jamais univoque et participe d’une polyphonie des discours. Pourtant les rhétoriciens classiques considéraient implicitement le titre comme l’espace d’une dialectique entre discours social et littéraire » (Vauterin, 1997 : 116). D’après Duchet, chaque titre est un texte littéraire et à la fois, publicitaire, il explique son propos : « Un message codé en situation de marché : il résulte de la rencontre d’un énoncé romanesque et d’un énoncé publicitaire » (Duchet, 1973c :77-78) ).

De même, il croit que toutes les deux, la littérarité et la socialité existent et croisent nécessairement : il parle de l’œuvre en termes de discours social mais le discours social en termes de roman. Le titre résume le roman : en réalité, le titre annonce le roman et parlant du contenu, du genre et du thème, il oriente la lecture. Pour Duchet, une sorte de psychologie commerciale est cachée dans le titre qui cherche à attirer, retenir et provoquer l’achat. Il existe dans le titre d’un roman, un message codé qui lie la littérature à la socialité ; du coup, le discours social se trouve dans le titre d’un texte romanesque. Le titre Au revoir là-haut rappel une lettre d’un soldat de la première guerre mondiale ainsi se trouve une relation entre le social, l’événement de la grande guerre, avec la littérature, le titre d’un texte littérature.

La titrologie de Duchet consiste, visiblement, en titre et aussi en  sous-titres. En effet, l’auteur parle de ses intérêts par le choix de sous-titres ; « les configurations para-textuelles sont présentées au lecteur et au critique, moins comme la possibilité d’un choix, que comme une véritable mise en demeure. Une telle disposition du titre, de la dédicace et d’autres paratextes éditoriaux comme la couverture ne sont évidemment pas sans conséquence sur le critique-chercheur, qui est attiré vers cette sorte d’intuition de la signification d’ensemble de ce roman réaliste » (Salimikouchi, 2012 : 72).

Le titre principal ainsi que le second titre ou sous-titre développe les informations sur l’histoire ; ainsi, la couverture contenant le titre apporte plus d’explications. La première page aussi comporte les informations telles que la date et le lieu de la publication, nom de l’imprimeur, collection et nombre de pages. Le titre c’est le premier contexte qui attire l’attention particulière de l’auteur et l’éditeur et il n’est qu’un des éléments d’une stratégie complexe du roman.

« À la suite d’interactions complexes, le titre et le texte ont des caractéristiques transversales placées à tous les niveaux de la textualité. Le parcours qui va du titre au texte permet de condenser et de dénommer l’unité à décrire. C’est-à-dire un parcours conçu comme micro totalité parce que le titre condense les indications sémantiques saillantes. Puis, d’établir avec le texte une forme "d’équivalence sémantique" : il peut s’agir des formes du titre pouvant être projetées sur un ensemble plus vaste pour rendre compte d’un discours donné » (Bavekoumbou, 2016 : 40).

 

Selon la démarche de Duchet, la page de titre est très importante de sorte qu’il suffit pour faire la publicité. Il déclare : « la page de titre est un support publicitaire qui n’a plus qu’à devenir couverture imprimée pour se transformer en affiche » (Duchet, 1973 : 50), mais malheureusement, nous considérons que, parfois, les livres sont catégorisés par auteur, genre, sujet, maison d’édition et même, le titre n’est pas écrit complètement ou les sous-titres sont supprimés, tandis que la page de titre est nécessaire pour l’efficacité.

En général, les sous-titres expliquent les titres qui portent parfois une ambiguïté, notamment quand les auteurs préfèrent utiliser un titre sans ajouter sous-titre en raison de brièveté et de simplicité. Duchet a écrit à ce propos : « La disparition du second titre tend à provoquer cette conséquence, dans la distribution calculée de la page, longtemps fondée sur l’équilibre prosodique des deux parties du double titre. L’harmonie perturbée se retrouve dans une nudité apparente [qui] lorsqu’elle est déguisée avec art, devient une simplicité noble, que l’homme de goût apprécie et recherche » (Duchet, 1973a :58). Ce fait de simplifier les titres, nous entraîne vers reproduire des nouveaux termes. Duchet croit que le titre est toujours une "dénomination détournée approximative et cryptonymique du texte", il paraît qu’il est né d’une idéologie de l’auteur et il cherche un équilibre entre les lois du marché et le vouloir-dire de l’écrivain ; pour cette raison Duchet conseille d’étudier le titre du roman du point de vue de hors-texte et du texte. Il ne s’agit plus de lire le caché du texte, mais d’établir ses conditions d’existence, c’est-à-dire de lui restituer son assise, toujours perçue et souvent invisible, située hors des mots et dans les mots (Duchet, 1971 : 9). Suivant la sociocritique de Duchet, le hors-texte est en relation avec le texte ; en fait, le hors texte est une réalité extratextuelle qu’il faut décrypter du texte et comprendre la réalité existante du hors-texte.

Comme Duchet souligne : « le hors-texte était plutôt une métaphore du rapport du texte et du monde qu’une définition acceptable » (Duchet, 1975 : 25). Tout en évoquant des lieux et des événements historiques et sociaux, le hors-texte établie des liens entre la société de roman et la société de référence et ainsi représente les références spatiales, temporelles et sociales ; comme Duchet affirme : « référence et hors-texte sont indissociables et l’une renvoie à l’autre » (Duchet, 1973c :451). Il ajoute que c’est : « Au cœur du texte, que l’on doit retrouver le Hors-texte » (Duchet, 1979 : 322).

Pour Claude Duchet, le titre est « une existence préexistante au roman ». En effet, le discours social du titre s’agit du réel et le discours littéraire du titre est le roman. D’après Duchet, le titre fonctionne comme le point de lien entre l’aspect littéraire et social d’un roman ; ainsi, afin d’analyser les deux aspects, il est obligatoire de décrypter les mots du titre. « Avec le titre, s’enclenche le travail d’interprétation du lecteur » (Roy, 2008 : 50).

Le titre d’Au revoir là-haut

Duchet esquisse la fonction référentielle qui se focalise sur l’objet. Le roman Au revoir là-haut est le titre d’un roman de Pierre Lemaître, en effet, ce titre est la reprise des derniers mots d’un soldat qui a écrit une lettre pour sa femme le 4 décembre 1914.

Jean Blanchard a rédigé ainsi dans sa lettre : « Je ne crois pas avoir mérité ce châtiment, pas plus que mes malheureux camarades… Au revoir là-haut ma chère épouse ». Lemaître a rédigé exactement ces derniers mots sur la première page de son roman et il les a employés deux fois tout au long du texte du roman. Le titre Au revoir là-haut fonctionne sur l’objet et il énonce des vérités sociales et historiques qui se lient à la grande guerre mondiale s’agissant aux injustices contre les survivants.

Nous pouvons déclarer que le titre de ce roman comprend aussi la fonction conative ; car Au revoir là-haut a centré sur le destinataire qui est lecteur contemporain, comme Blanchard qui s’est adressé à sa femme, l’auteur du roman s’adresse aux lecteurs contemporains du vingt et unième siècle pour rappeler les faits sociaux qui sont en train de se répéter, même à leur époque.

L’inventeur de la sociocritique énonce la fonction poétique centrant sur le message. Pierre Lemaître dans Au revoir là-haut a bien mentionné le message du contenu ainsi que nous évoque la première guerre mondiale ; ensuite, il rappelle le souvenir des survivants de la guerre, parce que cette lettre avait été écrite en temps de la grande guerre mondiale par un soldat qui est survivant de la guerre.

L’auteur de cette lettre et ses camarades avaient passé les pires jours et pour cette raison le titre informe d’une espace noire et triste. « Il reste que chaque unité de discours, chaque élément d’un titre produit du sens et que chaque transformation a des conséquences » (Roy, 2008 : 51). Lorsque les héros sont très importants, le nom du héros ou des héros sont considérés comme le titre, mais, de temps en temps, l’importance des évènements est plus éminente que les héros, dans cette condition, l’écrivain fait allusion à cet évènement historique ou social exactement, ce que nous observons dans le roman de Lemaître. Par conséquent, pour Lemaître, les héros ne jouent pas le rôle aussi important que l’indice historique.

Le titre Au revoir là-haut comporte le message littéraire et social, à la fois. « Au revoir » s’emploie lors de la terminaison d’un projet mais, bien sûr, l’utilisation en début porte une valeur poétique et littéraire ; d’autre part, « là-haut » a également un sens transcendantal, ambigu et mystérieux. De plus, ce titre évoque un événement réel historique et social repris de la lettre d’un survivant de la première guerre mondiale s’adressant à sa femme.

 Jean Blanchard était un des six personnes militaires qui a été exécuté, accusé à fuir de battre contre des ennemies, dans l’intention que des autres prennent la leçon de ne pas le commettre. Ce soldat mentionné avait 35 ans lors de la mort, il s’est marié, sans enfant, dans les derniers instants de sa vie, il a écrit une lettre à sa femme Michelle qui relève son cœur innocent et purifié. Ils étaient exécutés le  4 décembre 1914, en d’autres termes, dès le début de la première guerre mondiale, au moment où la fiction se déroule.

Lemaître a préféré profiter du terme avant utilisé pour reprendre l’effet d’une lettre d’un jeune opprimé durant la guerre. Il a choisi le titre Au revoir là-haut pour son roman et il commence la première page par la phrase de la lettre de Jean Blanchard : « Je te donne rendez-vous au ciel où j’espère que Dieu nous réunira. Au revoir là-haut, ma chère épouse… Derniers mots écrits par Jean Blanchard, le 4 décembre 1914». Ces mots sont écrits par l’un des six militaires qui se sont enfuis, en décembre 1914, à vingt kilomètres de l’ouest de Swansea, selon eux-mêmes, par l’ordre de leur commandant, de battre avec les Allemands, mais leurs excuses n’ont pas été acceptées et ils ont été exécutés comme une leçon pour les autres.

Nous retrouvons quatre sous-titres dans tout le roman : « NOVEMBRE 1918 », (Lemaître, 2013 : 6) « NOVEMBRE 1919 », (Lemaître, 2013 :121) « MARS 1920 », (Lemaître, 2013 : 285) « Épilogue » (Lemaître, 2013 : 463) et d’ailleurs, le mot de fin du roman est « Courbevoie, octobre 2012 » (Lemaître, 2013 : 467). Pourtant, toutes les parties se séparent par les nombres de 1  jusqu’à 42 ; tout cela nous démontre un roman documentaire, historique et repris d’une vérité amère, sans aucune subtilité. La page de titre comporte le nom de l’auteur, « Pierre Lemaître », la maison d’édition, « Albin Michel » et le prix de Goncourt qui motive les lecteurs pour connaître plus le récit.

La mobilité et la plasticité de l’énoncé titrant est une des conditions nécessaires d’efficacité. Parfois le titre évoque une espace socio-culturelle et une relation entre le titre et le texte. Le titre Au revoir là-haut fait allusion à une société indifférente aux oppressions d’entourage et aux hommes opprimés qui ont besoin de leurs voix et leurs réactions. Les valeurs pertinentes humaines et éthiques sont des objets oubliés dans l’espace culturel de la France.

Le titre et le roman ont une interdépendance l’un à l’égard de l’autre ; le titre annonce et le roman explique. Comme Au revoir là-haut annonce un retour aux années de la grande guerre mondiale en 1914, et puis, évoque les survivants affligés de la guerre ; du coup, le roman explique les aspects choisis de la première guerre mondiale et détaille les survivants et leurs positions sociales et familiale. Comme Pierre Lemaître a indiqué dans un entretien, son thème favorisé tourne vers la vengeance et aussi il voulait se moquer de la modernité et de tout ce que la guerre a laissé pour le monde.

Le titre Au revoir là-haut est une sorte de point de fin pour le grandissement de la guerre et relève les buts cachés de ce grand événement dans l’histoire de l’humain sans avoir les résultats utiles pour sa vie et sa civilisation. En comparant les jeunes soldats des années 1914 avec les jeunes d’aujourd’hui, il déclare dans cet entretien : « Les deux périodes racontent l’histoire de personnes qui n’ont pas démérité et se voient privées de la récompense sociale que la société leur avait promise » (Entretien avec Dupontel, 2017).

Le titre Au revoir là-haut est le hors texte qui explique la société du roman et au fur et à mesure, l’histoire du roman décrit ce titre, en évoquant à la société de référence, qui l’est, comme nous avons déjà mentionné, les misères de la première guerre mondiale pour les survivants de la guerre, qui n’avaient pas les titres militaires.

Pierre Lemaître a choisi des mots à décrypter ; tout en rappelant la première guerre mondiale et ses victimes opprimées, Lemaître veut parler de la répétition de l’Histoire et celle des erreurs des français en rapport avec leur société et les comportements et les personnages autour d’eux. Lemaître confirme lui-même que le peuple français du XXIe siècle atteint à ce problème que celui de XXe siècle après la première guerre mondiale.

Lemaître explique plus sur le titre du roman dans un entretien et compare les soldats qui combattaient pour que ce soit le désir et la volonté de sa société avec les retraites qui travaillaient pour la même raison, mais après avoir fini le projet, tous les deux sont rejetés et refusée pour la même société. Lemaître critique les mentalités de la société et prévient les conséquences désagréables de cette attitude d’injustice qui peut répéter pour les autres classes sociales ; les mots ci-dessous sont, exactement, ses idées personnelles :

« L’une de celles qui m’a le plus intéressé est la notion de rupture du contrat social. Les jeunes héros d’Au revoir là-haut sont, socialement, de bons petits soldats : ils font ce que la société leur demande. Ils font une guerre qu’ils n’ont pas désirée. Et qui plus est, ils la gagnent. Puis ensuite, ils ne parviennent pas à retrouver une place dans la société (je me suis inspiré en cela de la préface de Louis Aragon à Aurélien, c’est ainsi qu’il définit son personnage). Nos chômeurs Seniors d’aujourd’hui sont, mutatis mutandis, dans une situation comparable. Dans les Trente Glorieuses ils ont fait ce que la société leur intimait de faire : s’endetter pour une maison, une voiture, faire deux, trois enfants dont ils feront des individus employables, etc. Puis, avec la crise, ils se retrouvent au chômage et en étau entre deux injonctions contradictoires : travailler de plus en plus tard pour mériter leur retraite, et chômer parce qu’on les trouve trop âgés pour leur donner un emploi. Les deux périodes racontent l’histoire de personnes qui n’ont pas démérité et se voient privées de la récompense sociale que la société leur avait promise » (Entretien avec Pierre Lemaître, 2021).

La conclusion

Le titre est le plus important d’élément du roman ; les auteurs des romans les plus lus réfléchissent pour longtemps sur le titre. Les théoriciens et les chercheurs littéraires ont déjà étudié certains titres des romans. Ils ont découvert plusieurs caractéristiques en les classifiant. Du moment où les titres fonctionnent comme les publicités pour le commerce, pas mal des commerçants ont présenté leurs propres idées. Claude Duchet qui a inventé la sociocritique, a représenté les modalités pour connaître les aspects sociaux de la production des titres.

Dans cette recherche, nous avons étudié les facteurs sociocritiques de Duchet qui envisage de faire des recherches sur les points de vue littéraires et sociaux, et en même temps, les appliquer sur le titre Au revoir là-haut, écrit par Pierre Lemaître. En profitant de la méthodologie novatrice de Duchet, nous avons découvert les dix éléments sociaux du titre Au revoir là-haut. La méthode de notre travail a consisté à expliquer l’idée de Duchet et à énoncer la façon de l’intégration de cette idée sur ce titre.

Tout d’abord, nous avons détaillé la triple fonctionne du titre comprenant les fonctions référentielle, conative et poétique ; la fonction référentielle est centrée sur l’objet comme le texte littéraire de Lemaître évoque l’événement historique concernant les six victimes du mal-jugé en 1914 ; ensuite, nous avons étudié la fonction conative centrée sur le destinataire. Évoquant le silence et l’indifférence du peuple du début de vingtième siècle, le titre de ce roman s’adresse aux contemporains, tous ceux qui vivent dans le temps actuel et rencontrent les faits réels et le destin des certains gens concernant leurs attitudes. Enfin, nous avons vu comment Duchet a révélé la fonction poétique centrée sur le message et comment Lemaître s’est concentré sur le message de son roman qui ne réfère pas à un personnage ou un lieu défini mais à un événement qui répète tout le temps, autrement dit, c’est le public qui répète leurs erreurs.

Nous avons également illustré, à l'aide des extraits, à quel point, Duchet insiste à étudier les deux aspects littéraire et social en même temps. Selon lui, le titre ne reflète pas, non seulement, l’aspect social du roman mais bien évidemment, il indique à l’aspect littéraire aussi. Bien que le titre Au revoir là-haut fasse allusion à un événement historique et connu lié à la première guerre mondiale, ce titre a une valeur littéraire aussi, l’auteur a choisi les mots de la lettre de Blanchard qui évoque le poétique. Ainsi, d’après Duchet, les sous-titres et la page de titre pourraient bien donner les informations sociales et littéraires aux lecteurs. C’est pourquoi Lemaître, ayant choisi les nombres pour chaque partie, a également catégorisé la fiction par les dates exactes et réelles qui révèlent des événements plus documentaires et historiques et moins romanesque et imaginaires.

En définitive, du point de vue sociocritique, nous pourrions affirmer que tout titre romanesque raconte une réalité sociale et historique qui a besoin d’un décryptage minutieux et sérieux.

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