Le Jeu et l’Enjeu de la Parodie dans Hamlet de Laforgue et Macbett de Ionesco

Type de document : Original Article

Auteurs

1 Professeur, Département de langue et littérature françaises, Université de Tabriz, Tabriz, Iran

2 Doctorant, Département de langue et littérature françaises, Université de Tabriz, Tabriz, Iran

Résumé

La parodie, cette notion confuse et souvent dévalorisée, a toujours fait partie de la littérature. Les théoriciens de ce domaine n’auront plus qu’à explorer jusqu’au vertige cette notion soit en la limitant, soit en la généralisant. Gérard Genette la situe dans Palimpsestes au cœur d’une méthode de recherche : «la transtexualité». Sa théorie, bien rigoureuse théoriquement mais pas très pratique limite la parodie au régime ludique. D. Sangsue, L. Hutcheon, M. Rose et d’autres théoriciens de la parodie, ont essayé de l'élargir. Pourtant, ils se mettent en désaccord sur la présence ou de l’absence d’effet comique. Au cours de cet article nous verrons dans quelle mesure Hamlet de Laforgue et Macbett de Ionesco - les réécritures parodiques de Hamlet et Macbeth de Shakespeare - peuvent être qualifiées de parodies, et en quoi elles répondent aux caractères de cette notion. Nous étudierons également comment la parodie fonctionne dans ces deux œuvres et quelle est la nature de l’intention de ces deux écrivains à choisir une démarche parodique. À travers ces ouvrages qui sont les éminents représentants de la parodie - en considérant les éléments partagés des deux textes et les caractéristiques qui les distinguent - nous pouvons expliquer la nature variée de cette notion. En étudiant ces œuvres éloignées dans le temps, nous mettrons en lumière la flexibilité et le dynamisme de ce concept plus théorisé qu’appliqué.

Mots clés

Sujets principaux


Introduction

Comme disait Victor Hugo: "A côté de toute grande œuvre, il y a une parodie" (cité par Sangsue, 2007: 26). La parodie, cette notion confuse et souvent dévalorisée[1], a toujours fait partie de la littérature. À l'âge classique et au dix-septième siècle, elle n'était pas définie comme un genre. Elle était limitée à une pratique de la citation détournée de son sens, de son contexte ou de son niveau de dignité. Autrement dit, la forme la plus rigoureuse de la parodie était ce qu’on appelle aujourd’hui d’après G. Genette, la parodie minimale[2] et son objectif c'était plutôt de jouer avec les textes connus (Genette, 1982: 28). Au dix-huitième siècle, la parodie reste une simple figure, ayant pour l’objectif de défigurer les autres œuvres.[3] Le dix-neuvième siècle apparaît comme un tournant dans l'appréciation et le développement de la parodie. En sortant du domaine des tropes, elle acquiert une importance remarquable du fait de son autonomie. La fin de siècle, avec son engouement pour la réécriture et la littérature de second degré va permettre sa réhabilitation. Bien que certains auteurs de la fin de siècle la considèrent comme un symptôme de décadence, la parodie bénéficie d'une ré-évaluation. Comme le précisait Daniel Sangsue : «Pour l’esprit fin de siècle, qui multiplie les pratiques de détournement, le second degré apparaît à la fois comme un mot d’ordre et une fatalité». (Sangsue, 2007: 54).  C’est précisément dans ce milieu littéraire que l’une des œuvres problématiques de cette recherche prend forme : les Moralités légendaires de Jules Laforgue. À l’époque contemporaine où «des valeurs comme l’inspiration et le génie disparaissent au profit de conceptions plus «artisanales» de la littérature » (Sangsue, 2007: 60), la parodie et les notions semblables sont considérées à nouveau comme des étapes nécessaires de la création.  Mallarmé commence sa carrière par des imitations de Baudelaire, Proust par des pastiches et Ionesco par la réécriture des autres textes. Il parodie Macbeth de Shakespeare et donne naissance à Macbett, la seconde œuvre dont nous parlerons dans cette étude.

Les théoriciens de ce domaine n’auront plus qu’à explorer jusqu’au vertige la notion de parodie soit en la limitant, soit en la généralisant. En effet, le texte parodique est un texte construit avec d'autres textes (Zokhtareh, 2011: 32). Gérard Genette la situe dans Palimpsestes au cœur d’une méthode de recherche : «la transtexualité». Il distingue cette notion en la définissant comme une transformation thématique en régime ludique[4] (Genette, 1982: 45). Pourtant, une lacune subsiste dans la théorie de G. Genette : elle est bien rigoureuse théoriquement mais pas très pratique. En effet, l’entrelacement des régimes la rend peu applicable. D. Sangsue, L. Hutcheon, M. Rose et d’autres théoriciens de la parodie, ont essayé de la déborder. Leur point de désaccord, provient de la présence ou de l’absence d’effet comique. Selon Rose, le comique ne doit pas se confondre avec la dérision : la parodie n’a pas besoin de ridiculiser son modèle ou sa cible pour se prévaloir d’une composante comique (Rose, 1979: 35). L. Hutcheon évacue la notion d’effet comique : pour elle, rien dans la parodie n’implique la dérision. Elle refuse toute tentative de limitation de la parodie (Hutcheon, 1985: 54). Contrairement à Hutcheon, M. Hannoosh met l’accent sur l’effet comique. Pour elle, entre le texte parodique et l’œuvre originale, la « distorsion » en jeu est d’essence comique (Hannoosh, 1989: 13).

Le choix du corpus qui fait l'objet de cet article, pourrait sembler inattendu au premier abord. Des œuvres appartenant à deux siècles et à des genres différents, semblent peut-être difficilement comparables. Ce choix délibéré s'explique par notre intention de dévoiler les différents aspects de la parodie. À travers ces ouvrages qui sont les éminents représentants de la parodie - en considérant les éléments partagés des deux textes et les caractéristiques qui les distinguent - nous pouvons expliquer la nature variée de cette notion. En étudiant ces œuvres éloignées dans le temps, nous mettrons en lumière la flexibilité et le dynamisme de ce concept plus théorisé qu’appliqué.

Les deux auteurs, Laforgue et Ionesco, sont très différents, cependant ils ont des points communs très importants. Ionesco, comme Laforgue montre son goût pour la parodie dès sa première œuvre. Ils ont choisi, tous les deux, une démarche parodique et ils ont parodié les tragédies qui se placent au sommet de la littérature anglaise, ou pour mieux dire de la littérature mondiale : Hamlet et Macbeth de Shakespeare. Les réécritures des chefs-d'œuvre de Shakespeare par les deux parodistes, présentent de nombreuses différences et similitudes. Mais comment dans certains cas, la démarche parodique de Ionesco s'éloigne de celle de Laforgue et dans d'autres, elle s'en approche? Etudier le parcours d'écriture de Ionesco, comme celui de Laforgue, nous aidera à comprendre comment il arrive à parodier un chef d'œuvre de la littérature. En générale, nous essaierons de répondre à cette question essentielle : Qu'est-ce que vise la parodie dans leurs œuvres?

Ce passage d'un siècle à l'autre, nous montre la variation du concept de parodie. En général, la parodie en tant qu'un genre, n'a pas été largement traitée dans l'histoire de la littérature française. Ainsi, les exemples particuliers de réécriture parodique d'une œuvre intégrale ne sont pas nombreux. Même concernant ces quelques exemples qui existent, de nombreux critiques se discutent sur le fait qu'ils s'agissent de parodies ou non. Pour illustrer le concept de parodie et pour démontrer le dynamisme de cette notion, nous avons essayé de choisir deux réécritures sur leur genre parodique, la plupart des critiques et théoriciens du domaine sont d'accord. Au cas de Laforgue, nous expliquerons dans quelle mesure son œuvre peut être qualifiée de parodie, autrement dit en quoi elle répond aux caractères de cette notion. Nous allons également étudier les mêmes sujets chez Ionesco.

Nous constaterons que Ionesco, comme Laforgue, se fera le porte-parole des in­quiétudes modernes et de l'amertume souvent désespérée de ses contemporains. Il faut noter que l’ambition de ces deux parodistes n’est pas de proposer simplement leur version des réécritures, mais de relire celles-ci à l’aune d’autres ouvrages. Afin d’étudier cette notion dans les hypertextes[5], il nous faut d’abord voir dans quelle mesure ces œuvres peuvent être qualifiées de parodies, autrement dit en quoi elles répondent aux caractères de cette notion.

 

Hamlet de Laforgue, Macbett de Ionesco : des réécritures parodiques ?

Le terme de « parodie » est souvent attribué à Hamlet ou les suites de la piété filiale de Laforgue et à Macbett de Ionesco. Concernant l’œuvre de Laforgue, D. Grojnowski, spécialiste de l’auteur et de la parodie, note dans l’un de ses premiers articles parus sur ce sujet : « Laforgue, en travaillant à un recueil de nouvelles qui serait une œuvre d’art […], inverse les données et conçoit la parodie comme un genre parmi d’autres et qui en vaut un autre » (Grojnowski, 1978: 66). Il a repris la même notion dans sa thèse en la plaçant au cœur de sa réflexion sur l’originalité laforguienne. Quelques années plus tard, Michele Hannoosh propose, avec Parody and Decadence, Laforgue’s Moralités légendaires, une conceptualisation de la parodie qui repose entièrement sur l’analyse de ce phénomène dans le recueil. Plus récemment, en présentant les récits dans leur édition en livre de poche, Daniel Grojnowski et Henri Scepi affirment que « c’est bien de parodie qu’il s’agit» (préface In Laforgue, 2000: 39) De même, Alissa Le Blanc remarque dans sa thèse que « les mythes et les canevas légendaires, qui servent de support aux Moralités légendaires, se trouvent […] aspirés dans la spirale de la parodie » (Le Blanc, 2008: 369).

D’autres critiques posent des conditions à la composante parodique. Selon Octave Delepierre, le point essentiel de l’acte parodique est la substitution d’un nouveau sujet à celui qui était traité dans l’œuvre première (Deleprierre, 1870: 10). Selon sa définition, nous ne pouvons pas appliquer le terme de parodie à Hamlet de Laforgue. Car celui-ci a repris à son compte le même sujet ; Hamlet est toujours confronté à la mort de son père. Attribuer «le burlesque» ou «le travestissement» à cette nouvelle est également insuffisant. Même après une lecture simple, on trouve que ce héros laforguien est loin d’être uniformément burlesque. D’ailleurs, le terme de travestissement proposé par Genette signifiant «transformation stylistique à fonction dégradante» (Genette, 1982: 40),  ne rend pas compte de la diversité de tons et de niveaux de lecture hypertextuelle que l’on peut trouver dans cette nouvelle.

Selon D. Grojnowski, la parodie est parfois une catégorie réductrice pour les Moralités légendaires. Il écrit : «Telle qu’il l’exploite et, plus encore, telle qu’il l’invente, la parodie déborde le cadre topique, les régulations des genres, la cohérence référentielle, la relation intertextuelle» (Grojnowski, 1986: 220). Pour sa part, Élisabeth Surace affirme qu’il y a chez Laforgue, «l’outrepassement» du genre parodique (Surace, 2005: 135). Enfin, parodie ou plus que parodie, ce qui prime, c’est sa volonté d’utiliser le déjà-existant pour créer du nouveau. C’est précisément ce que Ionesco fera un siècle plus tard.

La notion de parodie, en particulier, a été toujours employée par les critiques pour analyser Macbett de Ionesco. Daniel Sangsue la présente comme l’œuvre représentative de la parodie et y consacre un chapitre entier de son livre La Relation parodique : « La parodie la plus importante qui se rencontre dans l’œuvre de Ionesco est Macbett. C’est la seule fois en effet où le dramaturge a composé une pièce entière à partir d’une œuvre étrangère à sa propre production et en tirant intégralement parti de cette œuvre» (Sangsue, 2007: 249). Audrey Lemesle, dans sa thèse concernant les réécritures ionesquiennes, cite à plusieurs reprises ce livre comme l’unique cas de parodie chez l’auteur : « Macbett constitue l’unique cas de parodie d’un texte intégral dans la dramaturgie ionescienne. Ce n’est peut-être pas en effet un hasard si Ionesco, qui voulait à travers Macbett mener une ré­flexion sur le caractère cyclique de l’histoire […] a choisi pour ce faire la parodie » (Lemesle, 2016: 270).

 Cependant, certains critiques hésitent à attribuer un nom ou un genre quelconque à cette réécriture. Selon le tableau des pratiques hypertextuelles de Genette, Macbett de Ionesco n’est pas une parodie mais une transformation sérieuse ou bien une «transposition» (Genette, 1982: 45). Ce n’est pas non plus une satire de Shakespeare, car Ionesco en réécrivant Macbeth n’avait pas l’intention de déconsidérer son modèle. Puisque la transformation ne se limite pas uniquement au plan stylistique, il ne s’agit donc pas d’un travestissement.[6] Si la parodie est une transformation ludique, la transposition est une transformation sérieuse. Qu’il s’agisse d’une transposition selon Genette ou d’une parodie selon d’autres critiques, il nous faut étudier l’élément commun de « transformation » caractérisant les deux notions. Si les transformations jouent un rôle important dans les deux réécritures, nous nous demanderons par la suite dans quelle mesure elles sont sérieuses ou comiques.

Avant de passer à la partie suivante, il faut préciser qu’à notre sens les transformations thématiques et formelles sont entremêlées. Autrement dit, une transformation peut se produire à la fois sur les plans formel et thématique. Pourtant, nous avons décidé de les étudier séparément pour rendre notre rechercheplus claire.

 

Les Transformations thématiques

Afin de voir comment la parodie fonctionne dans Hamlet de Laforgue, nous allons résumer les transformations principales que l’auteur fait subir à son modèle. L'histoire conserve une bonne partie de l'intrigue, des scènes majeures et des monologues célèbres du texte original. Ces éléments sont clairement visibles dans l’hypertexte, comme la scène du cimetière avec sa version décadente de « Hélas pauvre Yorick »[7] (Shakespeare, 1865: 310). Laforgue cite les phrases originales dans un contexte différent, faisant des fameux « mots, mots, mots »[8] de Hamlet la devise même de son héros parodique. Dans les deux textes, l’action de vengeance s’attarde jusqu’à la fin. Alors que, le but de Hamlet dans le texte-source est de venger son père (mission qui lui a été confiée par le Spectre à l’acte I), chez Laforgue, il se détourne parodiquement de ce projet de vengeance pour s’occuper d’une tout autre vocation : celle de ses ambitions littéraires. Ce qui lui importe le plus, c’est de devenir un dramaturge.

Chez Laforgue, Rosencrantz et Guildenstern font partie des personnages supprimés. Nous constatons parfois la suppression totale (pour Horatio) ou partielle (Ophélie et son père, Polonius) d’un certain nombre de personnages. Ainsi, les événements concernant les personnages font l’objet d’une narration rétrospective dans les monologues de Hamlet, notamment au sujet de la disparition d’Ophélie et de l’assassinat de Polonius. L’intrigue de Laforgue commence après la mort de ces deux personnages. Dans les deux cas, Hamlet interroge l’idée de la mort. Chaque auteur considère la question sous un angle particulier : Shakespeare insiste sur l’alternative entre vie et non-vie (Shakespeare, 1865: 274), Laforgue sur la place du moi dans le monde « ne plus y être, ne plus en être» (Laforgue, 2000: 77), mais au fond, le thème est identique. Bref, comme nous l’avons remarqué, les grandes lignes de l’action de Hamlet Shakespearien se retrouvent chez Laforgue.

 Ionesco aussi, comme Laforgue garde les traits principaux. Dans Macbett, comme dans son hypotexte, Duncan, pour récompenser ses plus vigoureux soldats, offre le titre de Candor à Macbett et promet celui de Glamiss à Banco. Ionesco reprend dans sa version, les prophéties des sorcières dans Macbeth ; que Macbett sera roi, que Banco donnera naissance à une lignée de rois sans en être un, et qu’une personne née d'une femme ne pourra faire de mal au roi Macbett[9] (Shakespeare, 1866: 78). Macbett assassine Duncan, et prend sa place et tue Banco pour trahison.[10] Comme Macbeth, la pièce se termine par le discours de Macol, par contre celui-ci annonce que la vie sous son règne sera pire que celle sous le règne du tyran Macbett. Dans Macbett de Ionesco, les sorcières - dont les deux se transforment en Lady Duncan et sa servante - s’attardent. Elles apparaissent après une longue description de la guerre de Glamiss et Candor. Le roi Duncan, souverain généreux et guérisseur dans Macbeth, présent uniquement au premier acte, devient un tyran cruel mais toujours guérisseur dans Macbett. Cette-fois-ci, il est présent dans environ trois-quarts de la pièce. Son assassinat a été longtemps reporté par Ionesco.[11]

Nous avons constaté jusqu’ici des transformations faites par les auteurs dans l’intrigue des hypotextes. La forme d’une œuvre parodique change également du fait de transformations au niveau du contenu.

 

Les Transformations formelles

À l’époque de Shakespeare, la littérature s’adresse en premier lieu à la cour. À la fin du XVIe siècle, l’euphuisme envahit tout, les livres comme le théâtre. Ce mot d’origine grecque signifiant « élégant », « de bon goût », concerne le style précieux et le bel esprit qui règne dans toute l’Europe. On trouve des exemples remarquables d’euphuisme chez Shakespeare.[12] Une grande partie du langage de Hamlet de Shakespeare est courtois, semblable au discours élaboré et plein d'esprit que recommande le guide de l'étiquette Baldassare Castiglione, en 1528 (Morrison, 2002: 230). Le discours de Claudius est riche de figures rhétoriques. Mais de tous les personnages, Hamlet a la plus grande compétence rhétorique. Il essaye d’orner ses propres paroles. Il a du mal à s'exprimer directement et pourtant, il orne sa pensée de jeux rhétorique et de jeux de mots.[13]

Laforgue reprend à son compte le style précieux de Hamlet de Shakespeare. Pourtant, il apporte des modifications formelles à certaines parties du texte afin d’en diminuer le niveau de dignité. De ce jeu subtil, il tire un plaisir ironique, amer et parodique. Cette activité de l'esprit ne provoque certainement pas le rire, mais un sourire intérieur, marque d'une satisfac­tion troublée ou bien d’une sorte d'humour sombre ou mélancolique. La préciosité n'est pas normalement accompagnée d’humour, mais chez Laforgue elle devient souvent étrange ou comique : « Piteux provincial ! Cabotin ! Pédicure ! » (Laforgue, 2000: 85). En utilisant ce style d’«artiste», il n’hésite pas à faire de son propre récit la cible d’une autoparodie.[14] Dans la préciosité de La­forgue, comme dans l'euphuisme de Shakespeare, existe une sorte de manie de perfection verbale. Toutefois, il ne faut pas oublier l’aspect écrit de l'œuvre de Laforgue. Il s'agit d'un monologue en forme de poème en prose. Il déverse un flot de poésie et d'humour, sur un thème qui reste shakespearien. Bref, cet hypertexte, qui nous a paru si riche, du point de vue du langage, provoque chez le lecteur un sourire àpeine esquissé mais permanent.

Ainsi, ce n’est pas seulement le contenu parodique de l’œuvre qui décide chez Laforgue de son caractère novateur et singulier. Son style garde la valeur du drame en vers de Shakespeare et se présente dans un style précieux (la musicalité des phrases ainsi que le soin porté au rythme en sont les meilleures preuves). Toutefois, il joue comme un élément parodique à travers le décalage qu’il engendre par apport au contenu et au style de son hypotexte.

Ionesco aussi, comme Laforgue essaie d’évoquer, dans son œuvre, l’esthétique stylistique de la tragédie shakespearienne. Laforgue narrativise Hamlet, il le transmodalise. Alors que Ionesco conservant le genre de source, impose des dramatisations outrancières à son hypertexte. De même, en intégrant dans ses phrases les mots incongrus qui provoquent des sourires cachés du lecteur, il transforme le style noble de l’hypotexte en un style noble en apparence, mais parodique au fond. Ce qui est remarquable dans l’œuvre d’Ionesco, c’est le vide sémantique relevé du travail du contradictoire qui est vu comme le thème central de cette dramaturgie. La contradiction, étant un excellent moyen linguistique pour rejeter l’autre, est à la disposition de l’auteur pour s’attaquer aux clichés et la banalité de la conversation quotidienne (Mohammadi Aghdash, 2019: 162).  Toutes ces transformations, constituent des « opérations de la parodie » que nous allons étudier par la suite.

 

Les opérations de la parodie

Les opérations de la parodie sont des moyens decréer des transformations et montrent comment elles fonctionnent sur les plans thématique et stylistique.[15]Ces opérations n’ont pas d’impact sur l’intrigue générale mais elles sont présentes partout dans l’hypertexte pour rappeler au lecteur qu’il a affaire à une réécriture parodique. Elles n’arrivent pas peut-être précisément à transmettre la complexité de la démarche parodique, mais elles nous aident à la comprendre chez les parodistes.

En effet, la parodie fonctionne sur des effets de contraste, de surprise, d’incongruité et de discordance, etc. Autrement dit, elle fonctionne sur des effets produits par certaines opérations quise varient selon les œuvres. Les opérations que nous évoquerons par la suite sont celles qui ont été principalement mises en œuvre par les deux auteurs qui sont le sujet de notre recherche.

 

L’incongruité

La parodie repose sur un mélange de familier et d’étrange. Il s’agit de jouer à la fois sur la reconnaissance et la différence. Elle attire l’attention du lecteur ou du spectateur par du « connu transformé en insolite qui est le plus souvent amusant » (Sangsue, 2007: 205). La présence d’éléments incongrus dans l’hypertexte crée la parodie. Il faut préciser que «créer l’incongruité» est l’opération principale de la parodie. La parodie n’est pas en elle-même une incongruité, pourtant elle a un rapport direct avec ce processus qui nous apprend que les contrastes qui existent entre l’hypotexte et l’hypertexte sont aussi importants que leurs similitudes. L’incongru « se manifeste hors de propos et ne remet rien en cause » (Jourde, 1999: 31). Autrement dit, il démontre le hors sens mais il ne remet pas en question le sens. Toutes les autres opérations que nous expliquerons désormais en font plus ou moins partie.

Comme le mentionne Daniel Sangsue dans La Relation parodique, selon Du Marsais « le souvenir du texte original et sa reconnaissance dans un contexte d’un ordre moins sérieux doivent former dans l’imagination du lecteur un contraste qui la surprend » (Sangsue, 2007: 205).  Ce que les rhétoriciens classiques appelaient « contraste » qui « surprend », les théoriciens contemporains de la parodie le nomment « discordance » ou « décalage ». Selon Margaret Rose, l’effet comique –sans lequel la parodie n’a pas de sens– est lié à l’incongruité ou au décalage entre le texte source et sa réécriture parodique : «C’est l’usage d’incongruité qui distingue la parodie des autres formes de citation et d’imitation littéraires et qui montre que sa fonction est plus qu’une simple imitation» (Rose, 1979: 22).

L’incongruité peut se trouver dans les détails thématiques et stylistiques. Dans Hamlet de Laforgue, l’incongruité rapportée à la parodie apparaît explicitement dans les phrases citées par le personnage contenant des philosophies et des théories courantes à l’époque de l’auteur.[16] Par exemple, la présence explicite du nom de matérialiste Hobbes, au sein d’un texte apparemment ancien surprend le lecteur: « Elle avait beau être adorable et fort mortellement sensitive, en grattant bien on retrouvait l'anglaise imbue de naissance de la philosophie égoïste de Hobbes»(Laforgue, 2000: 62).

Dans Macbett, les sorcières se livrent à un strip-tease,un limonadier et un chasseur de papillons traversent la scène de bataille. A un autre moment, Lady Duncan et sa servante apparaissent en bikini. Puis encore, les têtes des Pieds Nickelés[17] et de Ionesco se présentent soudainement dans le texte. De temps en temps, le lecteur s’étonne car ces éléments incongrus ou ces détails comiques ne relèvent pas du texte. Ils atténuent le tragique doublé[18] de l’œuvre ionescienne en faisant oublier aux lecteurs/spectateurs qu’ils sont face à « une aggravation de Macbeth » (Sangsue, 2007: 213)[19] et en leur rappelant qu’ils lisent/regardent simplement une version parodique.

Il faut noter qu’un parodiste professionnel essaie toujours de garder une juste mesure en produisant la parodie par l’usage d’éléments incongrus, car il est toujours menacé d’en faire trop ou pas assez. Si l’élément incongru est trop excentrique, il va perdre son caractère d’insolite et à l’inverse s’il évoque un décalage mineur, il risque de rester insaisissable par le lecteur.

 

L’anachronisme

L’incongru est souvent accompagné de l’anachronisme. L’anachronisme est, en effet, une des grandes ressources de l’incongru dans la parodie. Selon D. Sangsue « Un parodiste qui transforme un texte ancien ne tente que d’injecter le présent dans ce qu’il réécrit » (Sangsue, 2007: 213). En faisant une simple « recontextualisation », il crée du comique. Hamlet de Laforgue joue beaucoup sur ce genre d’incongruités ou bien de rapprochements intertextuels souvent surprenants liés à l’anachronisme.

Parfois, toute une parodie s’organise autour d’un anachronisme fondamental. Le premier et le plus explicite exemple d’anachronisme parodique chez Laforgue concerne la date de l’action : « C'est aujourd'hui le 14 juillet 1601, un samedi ; et c'est demain dimanche, dans le monde entier les jeunes filles iront ingénument à la messe » (Laforgue, 2000: 60). Laforgue combine en effet le jour le plus célèbre de la Révolution française avec l'année de la première représentation de Hamlet. Par cet anachronisme, Laforgue identifie et justifie sa version parodique en simulant que son histoire se déroule dans la même année où l'original a été exécuté. D’ailleurs, le 14 juillet a des connotations pertinentes au rôle révolutionnaire que joue la parodie dans l’histoire littéraire. Hamlet de Laforgue accède à la renommée littéraire grâce à cette "révolution parodique".

Généralement, l’anachronisme se manifeste dans chaque phrase de Hamlet de Laforgue. Un Hamlet tantôt classique tantôt moderne qui est au courant des philosophies récentes à l’époque de l’auteur. Laforgue met toutes les lectures d’un homme de dix-neuvième siècle dans la bouche d’un personnage de trois siècles antérieurs. D’une concordance hétérogène, comme la présence des analyses et des théories de Taine, Schopenhauer et de Hartmann d’un côté, et le personnage élisabéthain de l’autre, se relève l’anachronisme. Ainsi, derrière les anachronismes, l’ironie toujours présent du narrateur, et aussi derrière cette broderie intertextuelle,[20] il existe toujours le goût fort de Laforgue pour la parodie.[21]

Macbett de Ionesco comme Hamlet de Laforgue,use d’abondance de l’anachronismes. Si Shakespeare ne s'éloigne de la justesse historique que par des procédés de dramatisation, Ionesco s'en éloigne par des mentions d’objets appartenant aux époques ultérieures et les notions modernes intégrés à l'action. On peut relever par exemple les mots comme «pistolet», «infarctus», «gin», «pastis», «automate», «guillotine» etc. dans un texte apparemment appartenant au XVIe siècle. Les anachronismes dans Macbett s'expriment également sous forme des périphrases. Un monologue de Banco[22] est composé uniquement de défini­tions de moyens techniques modernes. Bref, les anachronismes marquant la distance temporelle entre l’hypotexte et l’hypertexte, créent d’abord l’incongruité, ensuite l’effet comique de la parodie.

 

La mécanisation 

La mécanisation fait partie des autres opérations sur lesquelles repose la parodie. L'écart qui se crée entre 1'original et l’hypertexte par cette opération parodique est dans la plupart des cas quantitatif. C’est Iouri Tynianov qui a parlé pour la première fois de cette opération dans un sens restrictif plus quantitative que qualificative(Tynianov, 1921: 74).  Ce procédé ne transforme pas les unités, il les répète, les accélère ou les ralentit. Il les modifie dans un sens caricatural et dans un but quantitatif (par les réductions ou les ajouts).

Chez Laforgue, les événements et les visites au cimetière, relèvent du dédoublement d’un épisode singulier chez Shakespeare. Hamlet de Shakespeare converse avec les fossoyeurs, médite sur le crâne de Yorick, assiste à l’arrivée du convoi funéraire d’Ophélie et se bat avec Laërtes dans la tombe de la jeune fille dans une scène unique, alors que la nouvelle de Laforgue présente deux scènes dans le cimetière. Dans un premier temps, Hamlet arrive trop tard pour l’enterrement de Polonius, se cache, discute avec les deux fossoyeurs, apprend la mort d’Ophélie, médite longuement sur le crâne de Yorick, se cache durant l’arrivée du convoi funéraire de la jeune fille, puis s’en va quand il est « assuré, bien entendu, que cette brute de Laërtes a filé avec toute l’honorable compagnie » (Laforgue, 2000: 78). Le lecteur de la moralité pense donc à cet instant que Laforgue a repris l’épisode shakespearien afin de le parodier en inversant le dénouement. Mais à la fin du récit, Hamlet revient au cimetière alors qu’il prenait la fuite avec Kate. Ainsi, cet épisode laforguien élabore ce qui n’était qu’une potentialité dans l’hypotexte. D’ailleurs, le qualificatif « cette brute de Laërtes » fait bien référence au combat présent chez Shakespeare et absent chez Laforgue. Bref, d’une manière typique de la parodie, de nombreuses scènes de l'original n'ont pas lieu chez ce dernier qui les déplace ou les omet complètement. Le Fantôme, Horatio, Ophélie et Polonius sont tous supprimés, les deux derniers sont morts juste avant le début de l’histoire.

Ionesco ne traite pas chaque évènement de Macbeth avec la même importance qu’il occupe chez Shakespeare. Certains sont traités de façon plus détaillées, d'autres moins. Un évènement raconté dans l'hypotexte devient prétexte à un développement dramatique dans l'hypertexte. Le complot de Glamiss et Cowdor évoqué (pas élaboré) dans quelques mots par Shakespeare, devient une grande guerre chez Ionesco décrite par les didascalies longues et détaillées.

La mort de Cawdor dans l’hypotexte est racontée à la scène 4 de l’Acte I, d’environ 5 lignes. Ionesco transforme ce court paragraphe, en une scène importante en ajoutant les descriptions et les évènements supplémentaires. Candor[23] tient un long discours devant ses vainqueurs. Ces derniers écoutent distraitement. Puis Candor et ses cent trente-sept mille hommes sont guillotinés. Enfin, les exécutions sont également parodiques du point de vue de leur gigantisme et leur énormité par rapport aux celles qui existent dans Macbeth.[24]Ionesco pratique souvent ce que Daniel Sangsue appelle « l’amplification parodique »(Sangsue, 2007: 258). Il grossit un motif Shakespearien en le transformant en un évènement démesuré et grotesque.

A l'inverse des ajouts, qui entraînent la dramatisation, les réductions s'accompagnent souvent d'un procédé de narrativisation. L’exemple remarquable de la réduction dans Macbett, c’est la narrativisation du meurtre de Banco par l’auteur. Alors que le meurtre de Banquo se développe dans les trois premières scènes du troisième acte et qu'il se fait par l'inter­médiaire de meurtriers dans Macbeth, il est tué chez Ionesco par Macbett sans toutes ces précautions au cours d’une scène brève.[25]

 

L’inversion

Une inversion se produit lorsque l'unité parodiée est transformée en une unité parodiant contraire ou opposée. Elle peut être marquée, c’est-à-dire signalée au lecteur par un indice visuel (emploi des guillemets, de l’italique, de la majuscule pour un mot seul, etc.) ou non-marquée. Laforgue use parfois de citations littérales, plus souvent toutefois, de citations transformées. Ces parodies minimales[26] tirées de divers hypotextes, tendent parfois à inverser le sens afin de créer l’incongru ; « Fragilité, ton nom est femme » (Shakespeare, 1865: 218) [27] du Hamlet shakespearien devient chez Laforgue « Stabilité ! Stabilité ! Ton nom est femme!» (Laforgue, 2000: 61). L’auteur lance un autre jeu parodique un peu plus loin en détournant, de manière comique, le titre français de la pièce de Shakespeare ; Tout est bien qui finit bien devient chez lui «tout est bien qui n’a pas de fin» (Laforgue, 2000: 72).

Concernant l’opération de l’inversion dans Macbett, il convient d’exprimer quelques exemples d’une manière plus claire et plus concise dans le tableau ci-dessous :

 

 

Macbeth

Macbett

Duncan est un bon souverain

Duncan est un souverain cruel

Malcom tient à la fin un discours humaniste et positif

Macol tient à la fin un discours matérialiste, inhumain et négatif

Macbeth a peur du spectre

Macbett se moque du spectre

Spectre est invisible pour les convives et vu par Macbeth

Spectre est visible par tous

étapes de la folie de Macbeth sont évidentes dans le texte

Il n'a pas l'air fou du tout

 

 

La dévalorisation (trivialisation)

La dévalorisation est le traitement d'un objet noble de façon vulgaire ou bien triviale. Michele Hannoosh dans son essaie Parody and Decadence associe trivialité et incongru dans sa définition des moyens de la transformation parodique : « distorsion de traits stylistiques, inversion de valeurs, transposition dans un contexte nouveau, incongru et souvent trivial » (Hannoosh, 1989: 13). Souvent ce qui excède ou le grand incongru dévalorisé, se trouve à la fin du texte. Compte tenu de dénouements des œuvres, nous pouvons constater que tous les deux font tomber le texte parodié dans la trivialité.

Hamlet de Laforgue à la fin du récit, veut fuir le monde de la tragédie afin de s’enrichir dans un monde nouveau qui l’attend. Tout au long du texte, il prend le geste de fuir philosophiquement en pensée, mais finira par le faire physiquement en décidant de partir pour Paris avec Ophélie-Kate[28], la comédienne de sa pièce. Mais lorsqu’il prenait la fuite avec Kate à la fin du récit, une petite impulsion métaphorisée « d’on ne sait quelle tarentule » -  et non le désir d’accomplir sa vengeance - le ramène lui dans le cimetière. Là, non seulement il rencontre Laërtes mais les jeunes hommes se battent et le premier tue le second. La mort de Hamlet, se présente comme un évènement banal qui ne change rien car selon l'avant dernière phrase de l’hypertexte « tout rentra dans l'ordre » (Laforgue, 2000: 89).

Chez Laforgue, Hamlet qui se trouve enfin confronté à l’action et au destin, se transforme aussitôt d’une façon triviale en héros littéraire. L’auteur tente de mettre dans la bouche du narrateur et des personnages les phrases qui attribuent ironiquement la qualité héroïque à Hamlet : «Notre héros s’affaisse sur ses genoux orgueilleux, dans le gazon, et vomit des gorgées de sang» (Laforgue, 2000: 89), dit le narrateur en décrivant la mort de Hamlet. D’ailleurs, lorsque Kate découvre le cadavre de Hamlet, elle s’interroge « Pauvre héros… Que faire ? » (Laforgue, 2000: 89).[29] L’auteur de la moralité souligne ainsi, que son personnage est devenu lui aussi, définitivement un héros littéraire, comme Hamlet de Shakespeare. Ainsi, pour le devenir, il n’a pas eu besoin d’accomplir un acte héroïque, il lui aurait suffi de se faire tuer comme son modèle. De même, le narrateur n’hésite pas à dévaloriser ironiquement les développements philosophiques du jeune prince au cours de l’histoire, en les résumant dans la dernière phrase de la nouvelle, « et rend son âme hamlétique à la nature inamovible» (Laforgue, 2000: 89). [30]

L’assassinat de Macbett à la fin de la pièce est également dévalorisé chez Ionesco. Il est tué lors d’un combat singulier par Macduff avec le courage et l’honneur dans un geste héroïque en disant : « frappe, Macduff ; et damné soit celui qui le premier criera : «Arrête ! assez!». (Ionesco, 1972: 376). Dans Macbett, Il est tué de dos par Macol après avoir dit «merdre!» [31] (Ionesco, 1972: 112). Alors que chez Shakespeare, la mort de Macbeth était un acte de justice nécessaire qui a ouvert une période de prospérité, la mort de Macbett apparaît comme un acte de lâcheté peu important, voire trivial. Macol, le souverain suivant, n’est pas meilleur que Macbett. Ionesco réfute l’idée du meurtre nécessaire de Macbett pour amener la prospérité. Un pouvoir qui fait suite à un meurtre ne peut être que dictatorial.

 

L’objectif de la parodie chez Laforgue et Ionesco

Ce qui reste à expliquer, c’est la nature de l’intention de ces deux parodistes. Le premier objectif qu’ils partagent c'est de rendre hommage à leur maître, Shakespeare, et de l'admirer mais une admiration détournée (comme l’appelle Sangsue, 2007: 106) ou bien un hommage qui ne veut s’avouer comme tel. C'est le premier objectif, mais ce n'est pas le seul. Concernant Laforgue, les critiques ont tendance à croire qu’il commence à réécrire et à parodier certains textes, afin de se débarrasser de toutes ses lectures et de les mettre en distance. Selon Pierre Loubier, pour le jeune poète, la littérature antérieure est une sorte de «substrat encombrant» (Loubier, 2000: 33), qui doit être critiquée par un auteur pour qu’il puisse s’en détacher et faire émerger sa propre voix. Or, un parodiste professionnel a «la puissance d’être à la fois soi et un autre» (Baudlaire, 1976: 643). Il imite l’œuvre admirée tout en restant indépendant.

Nous pensons que Laforgue se livre à cette vaste opération critique, pour appeler une inspiration d’un nouveau genre et qu’il parodie les œuvres pour s’éloigner de l’imitation pures, pour créer de «l’original». Ce poète décadent est lui-même contre la décadence littéraire. D’après Michele Hannoosh, la moquerie laforguienne ne se limiterait pas aux œuvres antérieures mais prendrait aussi pour cible la décadence elle-même (Hannoosh, 1989: 7). Laforgue voit dans la parodie, cette littérature au second degré, un moyen de sortir de la paralysie de l’imagination et de la puissance créatrice. En parodiant, il transforme les légendes vieillies dans lesquelles il trouve son inspiration. Ainsi, Laforgue parodie les œuvres antérieures d’abord pour s’approcher et s’éloigner de ses lectures en même temps, ensuite dans un but littéraire, au profit de la littérature et afin d’influencer ce domaine. Bref, il parodie la littérature pour lui redonner la vie.

L’objectif de la parodie chez Ionesco est différent de celui de Laforgue. Si Laforgue parodie à des fins littéraires, Ionesco le fait dans un but satirique et pour dresser une satire de la société. Nous n’avons pas l’intention de montrer en quoi son œuvre est de satire, nous nous limitons seulement au rapport qu’il entretient avec la parodie. D’après la définition de Sangsue la parodie satirique est «la transformation parodique d’un texte dans le but de faire la satire d’un objet extérieur à ce texte» (Sangsue, 2000: 232). Mais pourquoi pratiquer la parodie à des fins satiriques ? Une phrase de Nabokov répond à cette question : « satire is a lesson, parody is a game » (Nabakov, 1990: 75). Ainsi, une parodie satirique est une combinaison du jeu et de la leçon. Elle permet à l’écrivain d’exprimer sa leçon en guise du jeu. La cible de la satire est sociale, morale et non littéraire, tandis que celle de la parodie est la littérature. La parodie s’attaque aux textes et la satire ridicule les bêtises humaines et les faiblesses de la société et des gouvernements afin de les corriger. Parfois l’une utilise l’autre : par exemple la parodie se sert de la satire et réciproquement. Chez Ionesco, la satire se sert de la parodie. Il intègre sa vision du monde dans une parodie satirique. Il rejette tout théâtre au service d’une idéologie et s’oppose à la littérature didactique comme au théâtre engagé de Sartre et Brecht.[32] Pourtant, Ionesco est contre le théâtre engagé et idéologique, il n’est pas également pour un théâtre sans idées. Pour cette raison, il opte pour un théâtre parodique qui dénonce l’inacceptable social par les moyens du comique et de l’absurde.

A la fin, il convient bien de préciser l’objectif partagé de ces deux parodistes : leur désir de renouveau littéraire. Chez eux, la parodie n’est pas rupture ou destruction, elle remplace les formes périmées par les formes nouvelles sans lesquelles il n’y aurait pas d’«évolution littéraire» possible. Pour Laforgue et Ionesco, l’originalité n’est pas liée au nouveau, mais à la capacité de réinterpréter l’ancien. Autrement dit, ils trouvent l’originalité dans la transformation du passé. Cette phrase de Laforgue «Il faut faire de l'original à tout prix»[33] (Laforgue, 1986: 822), dite à l’époque des décadents, juste au moment où un grand nombre d'écrivains croit que «tout est dit»,[34] montre bien qu’il cherche l’originalité dans la reprise. Bref, soit une nécessité pour le renouvellement littéraire, soit un symptôme de décadence, ce qui importe c’est que la parodie apporte toujours une nouvelle vision du monde.

Certainement, nous ne pouvons pas aborder ici l’ensemble des raisons profondes pour lesquelles Laforgue et Ionesco ont choisi une démarche parodique, mais elles pourront ouvrir les nouvelles pistes de recherche aux sociologues de la littérature.

 

Conclusion

En guise de conclusion,ilnous faut brièvement revenir au sujet que nous avons évoqué au début de cet article car la parodie est toujours apparue comme une notion littéraire discutable.  En général, les textes critiques concernant le sujet de la parodie revendiquent une sorte d’hétérogénéité. Le sens du mot « parodie » paraît général chez certains, restreint chez d'autres. Dans cette multiplication des points de vue où se trouve-t-il enfin le « juste milieu » de cette notion ? Il ne faut « ni la « minimaliser, ni la voir partout… », pour reprendre une expression de Daniel Sangsue (Sangsue, 1994: 5).[35] Cette opinion pourrait aider les chercheurs de ce domaine à appliquer ce concept plus qu'à le théoriser.

Nous avons également démontré qu’à quel point les idées sur l’effet comique de la parodie sont différentes. Nous sommes d’avis que l’effet comique, même minimal ou sombre est l’une des composantes essentielles de la parodie. Il « soulage un instant le lecteur et l’écrivain de la fatigue du sens » (Jourde, 1999: 306). L’humour laforguien présent dans Hamlet et le sourire caché existant toujours au coin de ses phrases, rendent la mélancolie littéraire laforguienne plus térébrante. La parodie pour cet hydropathe et ce fumiste de la fin de siècle est la meilleure arme pointée vers le pessimisme. L’humour noir a un effet comique de toute façon, et apporte un sourire, bien qu’il soit noir, amer et caché comme celui de la Joconde.

 Comme nous l'avons montré, dans Hamlet de Laforgue et Macbett de Ionesco, les œuvres typiquement parodiques, la transformation se fait sur les deux plans thématique et formel à travers des opérations variées et en ayant des fonctions ludique, satirique et sérieuse. Parfois, la transformation parodique se réalise par le recours à des hypotextes multiples. Il est à noter que l’hypotexte ne possède pas toujours une existence autonome hors de l’hypertexte, mais en tant qu'hypotexte incorporé ou implicite, il pourrait se placer à l’intérieur même de l’hypertexte comme dans le cas de Hamlet etde Macbett. En plus de Hamlet de Shakespeare, Laforgue parodie les courants et l’ambiance littéraire régnant à son époque. D’ailleurs, Ionesco également à son tour critique les évènements sociaux de son temps en choisissant une démarche parodique. En somme, l’ironie, la satire et la parodie étaient toujours l’arme d’un écrivain ou d’un artiste qui voulait exprimer ses insatisfactions en faisant de l’art et de la littérature. D’ailleurs, parfois il vaut mieux de dire les choses de façon détournée pour éviter le discrédit du public voire la censure.

Les cibles de la parodie pourront varier d’après le choix de l’auteur, même à l’intérieur des œuvres d’un même auteur les procédés parodiques et les éléments parodiant ne se répètent pas à l’identique. La cible de la parodie chez Laforgue est textuelle, alors que chez Ionesco elle est extratextuelle, c’est-à-dire référentielle (l’actualité, l’histoire, etc.).

Finalement, il convient d’ajouter que la parodie relève autant de la lecture que de l’écriture. Elle est un acte de communication, mettant en relation un auteur-encodeur et un lecteur-décodeur. La compétence du lecteur s’en trouve d’autant plus sollicitée. Cette communication parodique réussit lorsque le lecteur reconnaît et identifie la présence d’un autre texte dans le texte parodique qu’il lit. Pour une réception parodique, le lecteur doit disposer ses compétences interprétatives. De même, la parodie doit être assez précise pour évoquer dans l'esprit d'un lecteur instruit l’hypotexte parodié. Bref, la réception de la parodie est aussi importante que sa création. En lisant une œuvre parodique, chaque lecteur peut créer « sa propre parodie». Comme précise Allain Vaillant dans son œuvre brillante, La civilisation du rire, ce qui fait rire un lecteur n'est pas forcément comique pour un autre (Vaillant, 2016: 27). Nous espérons pouvoir en parler d’avantage dans nos prochaines recherches. 



[1] Dans la plupart des cas, celui qui traitait cette pratique est considéré comme un plagiaire ou comme un parasite qui se nourrit aux dépens des créateurs originaux.

[2] Genette définit « la parodie minimale » comme suit : "reprendre littéralement un texte connu pour lui donner une signification nouvelle en jouant sur les mots".

[3] Les auteurs comme Du Bos, Voltaire ou d'Alembert la mettent sur le compte de la haine et de l'envie.

[4] L’hypertextualité n’est en effet pas seulement définie par les relations de transformation ou d’imitation qui unissent les hypertextes à leurs hypotextes, mais aussi par les fonctions de ces relations, c'est-à-dire leur intention et leur effet. Ces fonctions, Genette les nomme « régimes » et il en distingue trois : les régimes ludique, satirique et sérieux.

[5] Genette définit l'hypertexte comme tout texte dérivé d'un texte antérieur par transformation simple ou par transformation indirecte : imitation. Cette relation est basée sur la dérivation de l'hypotexte (texte imité) à l'hypertexte (texte imitant). Nous reprenons par la suite, le mot « l’hypotexte » pour le texte parodié et « l’hypertexte » pour celui de parodiant.

[6] Le travestissement selon Genette est la transformation stylistique à fonction dégradante, comme Virgile travesti.

[7] Hamlet de Shakespeare arrive au cimetière avec Horatio et plaisante avec l'un des fossoyeurs, qui déniche le crâne d'un bouffon de l'enfance de Hamlet, Yorick. Hamlet prend le crâne à la main, disant "hélas, pauvre Yorick". Laforgue reprend la scène et même la phrase citée dans l’hypotexte.

[8] Laforgue insère directement les mots de Shakespeare dans son texte : « Words ! words ! words ! entendez-vous ! des mots, des mots, des mots !». (Laforgue, 2000: 74)

[9] Ionesco parodie évidemment cette phrase shakespearienne : "aucun homme né d'une femme ne pourra atteindre Macbeth". Ainsi, Macbeth comprend qu'il est inatteignable puisque tout le monde naît d'une mère, mais il a finalement été tué par Malcolm (né par césarienne). Chez Ionesco également, Macol (qui est l’enfant de Banco et d’une gazelle) tue Macbett et monte à son tour sur le trône.

[10] Il convient d’ajouter que la personnalité de Banco dans Macbett diffère de celle de Banquo chez Shakespeare. Banco apparaît dans la première moitié dela pièce comme un double de Macbett. Il participe au meurtre de Duncan contrairement à Banquo dans Macbeth. Ces exemples mettent en évidence le caractère très libre de l'adaptation de Ionesco.

[11] L’assassinat de Duncan, comme celui de Venceslas dans Ubu roi, a lieu en plein jour et prend la forme d’un meurtre collectif, perpétré par Macbett, Banco et Lady Duncan.

[12] L’euphuisme se définit comme un ensemble de procédés grâce auxquels le style acquiert une symétrie riche ; le balancement des phrases, les allitérations, les consonances, les antithèses, etc. C’est aussi intéressant de rappeler brièvement le vice du siècle de Shakespeare : "les Précieux-Ridicules" venus souvent d’Italie qui excédaient d’employer cette figure en parlant.

[13] Ce n'est que tard dans la pièce, après son expérience avec les pirates, que Hamlet est capable d'exprimer librement ses sentiments. Il utilise des métaphores hautement développées, la stichomythie, et en cinq mots mémorables déploie à la fois anaphore et asyndéton : « mourir : dormir - / Dormir, peut-être rêver », « to die: to sleep, to sleep, perchance to dream ».

[14] « – Voilà, pourtant ! Mon sentiment premier était de me remettre l’horrible, horrible, horrible événement, pour m’exalter la piété filiale, me rendre la chose dans toute l’irrécusabilité du verbe artiste, faire crier son dernier cri au sang de mon père, me réchauffer le plat de la vengeance ! » (Laforgue, 2000: 68) (nous soulignons)

[15] Dans une perspective moins structuraliste, nous pouvons consi­dérer ces opérations comme des simples figures de style et non comme les opérations inévitables.

[16] « Tu sais que j’ai mangé du fruit de l’Inconscience ! » (Laforgue, 2000: 61-62).  « Méthode, méthode, que me veux-tu ? » (Laforgue, 2000: 61-62).

[17] Les Pieds nickelés est une série de bande dessinée créée par Louis Forton, publiée pour la première fois le 4 juin 19081 dans la revue L'Épatant, éditée par les éditions Offenstadt, fondées par les frères du même nom.

[18] Comme précise Ionesco : « le comique étant l’intuition de l’absurde, il me semble plus désespérant que le tragique » Notes et contre-notes, p.61

[19]  Selon G. Genette, Macbett de Ionesco est « une aggravation du Macbeth » et « un Macbeth poussé au noir » (Genette, 1982: 504).

[20] Laforgue écrit à Kahn au moment où le premier de ces récits va paraître dans La Vogue : « Mon volume de nouvelles, tu en connais le principe : de vieux canevas brodés d’âmes à la mode» Lettre à Gustave Kahn, [3 juin 1886](Laforgue, 1986: 852). C’est une explication importante car elle éclaire son choix des titres du recueil, mettant la lumière sur son procédé d’écriture : le phénomène de réécriture qui donne naissance au texte ; le déjà-écrit ou l’hypotexte est indiqué par la métaphore du « canevas » et le rapport entre le texte originel, qui va être retravaillé, et celui qui est issu de cette réécriture est présenté en juxtaposant « Vieux canevas » et « âmes du jour ».

[21] Camille Mauclair, premier éditeur des Œuvres complètes de Laforgue, notait ainsi : « Les Moralités légendaire demeurent un monument singulier et unique dans notre littérature. L’esprit philosophique de Jules Laforgue allait bien plus loin que le goût même de parodier. […] L’anachronisme appliqué à la légende en relie simplement le sens moral à notre vie ; et la déformation n’en a pas lieu pour la seule facilitation du comique. […] Elle commente, elle augmente, elle permet à l’écrivain une création originale. »  Camille Mauclair, Mercure de France, vol. XVII, n° 75, mars 1896, cité par (Hannoosh, 1989:220).

[22] « BANCO : […] Aurait-elle trouvé le moyen de capter les vibrations des ondes ? Aurait-elle inventé les miroirs qui reflètent des images et des figures lointaines, comme si elles étaient là, comme si elles nous parlaient, à deux mètres devant nous ?» (Ionesco, 1972: 59).

[23] Ionesco parodie même les noms des personnages shakespeariens en lançant un jeu onomastique ; il transforme Macbeth en Macbett (bête ! la bêtise, l’animalité) Cawdor en Candor (quand dort ?) ou Malcolm en Macol (ma col !).

[24] L’effet parodique de cette scène est renforcé par la cruauté de sang froid de Duncan. Il dit : « Je vous ai réservé une surprise, chérie. Le spectacle sera plus copieux que vous ne le pensez. Il est juste que les soldats qui ont servi Candor soient exécutés à sa suite. Ils ne sont pas très nombreux : cent trente-sept mille, ce n'est ni trop, ni trop peu. » (Ionesco, 1972: 99).

[25] « Banco apparaît. / Banco : Que me veux-tu, Macbett ?/ Macbett : Lâche, c’est donc ainsi que tu voulais me récompenser des bienfaits que j’avais l’intention de t’accorder ? Il enfonce le poignard dans le cœur de Banco. » (Ionesco, 1972: 93).

[26] Minimales selon G.Genette, ponctuelles selon D. Sangsue et microparodies chez D. Grojnowski.

[27] « Frailty, thy name is woman », « Fragilité, ton nom est femme! », (Shakespeare, 1985:218).

[28] Le retour d’Ophélia de Shakespeare à la nouvelle de Laforgue se présente comme une reprise parodique. Ce n'est que lorsqu’elle s'appellera Kate que Hamlet pourra songer à l'aimer. « Hamlet : Comment ! encore une Ophélia dans ma potion ! […] Pour moi, qui ne suis qu’un paria, n’auriez-vous pas un autre nom de baptême (de Baptême, entendez-vous !) pour l’amour de moi. —Kate :  Si, Seigneur, je m’appelle Kate. » (Laforgue, 2000: 65).

[29] Le terme n’est jamais employé de cette manière avant cet épilogue. 

[30] Son premier monologue par exemple, dans lequel il affirme son attachement aux principes de Hartmann et de Schopenhauer est introduit par cette phrase : « Le prince Hamlet en a comme ça long sur le cœur, plus long qu’il n’en tient en cinq actes ».(Laforgue, 2000: 62). A travers cette phrase, il réclame son incapacité à faire comprendre soi-même et sa philosophie dans une petite nouvelle, alors que Hamlet de Shakespeare arrive à le faire en cinq actes. De même, l’idée que la nature est « inamovible » se trouve très largement chez Hartmann et Schopenhauer.

[31] En utilisant le mot « merdre », Ionesco fait également une allusion parodique àl’Ubu roi de Jarry qui s’ouvre par ce mot.

[32] « Tout théâtre d’idéologie risque de n’être que théâtre de patronage » (Ionesco, 1966: 57).

[33] Il l’écrit dans une lettre à sa sœur, [14 mai 1883], (Laforgue, 1986: 822)

[34]« Tout est dit, et l’on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu’il y a des hommes qui pensent. » ( De La Bruyère, 1868: 130). Laforgue cite une idée semblable dans un article de critique littéraire : « Tout est d’avance un lamentable cliché. »

[35] L’auteur cherche lui-même à formuler une définition « opération­nelle » de la pa­rodie.

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