Type de document : Original Article
Auteur
Doctor graduée de l'université Shahid Beheshti, Tehran, Iran
Résumé
Mots clés
Sujets principaux
Introduction
Marie d’Agoult née vicomtesse de Flavigny (1805-1876), est issue d’une famille noble. Très jeune, elle se marie avec le colonel Charles d’Agoult, de vingt ans plus âgé qu’elle. Mais, elle abandonne son mari et sa fille de 5 ans pour devenir la compagne de Franz Liszt avec qui elle va vivre une relation amoureuse avant de rompre en 1844. Dans son roman éponyme Nélida (1846), la romancière raconte ses amours avec le pianiste hongrois qui a souvent surnommé Marie d’Agoult "Nélida". Le roman relate l’histoire d’une femme qui, comme l’auteure, déchirée entre un amour hors mariage et le serment conjugal, choisit le premier. S’il allait apporter la prison à la protagoniste, ce choix expose la romancière à la condamnation à l’adultère et sa vie privée aux critiques des détecteurs. Le roman fini par provoquer la curiosité du lecteur qui demeure ignorant du destin de l’héroïne. Celle-ci, face aux jugements de la société, se met à la fois à une marginalité et une intégrité sociale. L’ouvrage, avec sa portée fort autobiographique, est publié sous le pseudonyme Daniel Stern. Ce qui soupçonne, par la nomination, une mise en abyme parfaite de l’auteure dans son personnage : "Nélida" est l’anagramme de "Daniel", celui-ci étant le prénom littéraire de l’écrivain et celui de son enfant qu’elle a eu avec Liszt et qui meurt très jeune de tuberculose. Ainsi, dès l’entrée du roman, le lecteur se voit piégé dans un triple jeu : il y existe une maîtresse travestie, une maternité refusée et une intellectualité interdite. Déjà, le motif apparaît sur la couverture du livre qui juxtapose le nom littéraire de l’écrivain au titre constitué du nom et du personnage éponyme : la relation qu’ils établissent avec la thématique de la pseudonymie. Que produit une telle formulation du titre allant en parallèle avec l’usage nominal que la romancière fait de son nom littéraire ? Quel éclairage peut-elle apporter sur la position d’une mère intellectuelle ? Cette problématique émet une hypothèse à partir de l’horizon d’attente du lecteur qui est supposé « conscient de cette anagramme ». Les traits implicite et explicite dans le pseudonyme concèdent en soi, une place à tous ceux qui participent aux domaines littéraires ; et cela d’une manière systématique sans risquer toutefois le délicat aspect de lettres. Dans cette appropriation de la beauté littéraire, sont plus remarquables les œuvres dont les titres établissent une relation équivoque avec le nom littéraire de l’auteur. C’est pourquoi notre recherche se divisera essentiellement en quatre parties consacrées à l’étude du nom. Nous y allons d’abord définir le statut de la mère-auteure au XIXe siècle, en traitant sa pratique pseudonymique. Puis, nous étudierons la pseudonymie dans son rapport avec les courants significatifs de l’époque. Ensuite, nous aborderons la question de la renaissance de la mère-auteure avant de justifier la pertinence d’une lecture à rebours. La modalité réceptive du nom et les affects qu’elle peut produire sur le processus de l’activité lectoriale et le lecteur nous impose l’étude de certains éléments de l'esthétique de réception dans le cadre d’analyse contextuelle situant la romancière dans le contexte qui la pousse vers tel choix du titre. Il faut que nous présentions aussi la pertinence d’une lecture anagrammatique dans le cadre de l’esthétique de l’horizon d’attente de l’auteur.
Mère-auteure : un marchand littéraire
On ne peut nier la vision que la bourgeoisie propose de l’argent et son hostilité avec les choses intellectuelles, à savoir la littérature. Dans l’introduction de son ouvrage la condition littéraire, Bernard Lahire parle d’un "abus de langage" pour qualifier les hommes et les femmes de lettres. On les appelle "écrivain" de la même manière que l’on parle de "médecins". Cet emploi du terme ne lui semble pas légitime car il se fait dans le but de pouvoir parler d’une certaine "position sociale de l’écrivain", ce qui n’existe pas du tout dans la société matérialiste du XIXe siècle. Alors pourquoi ne pas traiter la situation des femmes auteur sur le même plan ? Surtout que l’ambiguïté du statut d’écrivain se renforce quand il s’agit des écrivaines qui cumulent deux aspects de l’écriture comme source de gagne-pain et à la fois moyen de l’exposition d’une figure sociale. Dans ce sens, le côté immoral auquel sont condamnés des femmes de lettres, réside plus particulièrement dans ce fait qu’elles délivrent à la publicité ce qui est destiné exclusivement à demeurer privé, et d’en faire de la marchandise. Les aventures amoureuses, les douleurs et les joies que ces femmes reflètent dans leurs œuvres, semblent au public comme un commerce des affections, au pire comme une prostitution de sentiments : « O Mesdames Tastu, Valmore, comtesse Merlin, duchesse d’Abrantès, Delphine Gay, Sand, Loisa Puget, etc. que je vous plains ! Vous qui mettez en vers, en prose, en mémoires, en chants, en pleurs, en rire, toutes vos émotions, tous vos sentiments, tous vos souvenirs ! » écrit Laure Surville et cite Christine Planté : « Qu’avez-vous donc pour vos amis, vous qui donnez tout aux indifférents, vous qui, pour une méchante couronne que personne ne vous offre, perdez tous vos voiles et toutes vos chastetés ! » (1989 : 85-86).
Marie elle-même se plaint de la bouche de son personnage des « couronnes dont le poids l’aurait écrasé » (Stern, 1846 : 132). Ces accusations s’accentuent quand la femme-auteure occupe la position de mère. Là se justifie, la légèreté des ouvrages des mères-auteurs parmi lesquelles Marie d’Agoult n’est d’ailleurs pas mal placée[1]. Comme celle qui est parvenue à publier sa vie intime, ayant abusé une identité masculine, et surtout à faire de l’argent de ses affections maternelles : « Tandis que les ouvrages produits par ces femmes attisent en grande partie la curiosité du public lecteur, ils sont traités sérieusement sous les regards des critiques qui ne refusent pas d’en voir les productrices comme les prostituées » (Del Lungo et Louichon, 2013 : 29).
Ainsi, la littérature dite "marchande", renvoie la mère-auteure à une « duplicité horrible » (Stern, 1846 : 121) : La mère qui prend la plume, par son geste intellectuel et dans le souci de rejoindre l’éternité, rappelle une fragilité féminine du point du vue spirituel et corporel surtout qu’elle est condamnée à avoir abusé le sacré rôle de mère et cela par la trafique de ses affections familiales. Elle va bientôt se dégrader dans sa personnalité, de même que son art va s’abaisser à une chose vénale. Voici Marie qui lamente comme son personnage Guermann, l’artiste : « J’ai vendu une création que vous aviez inspirée, vendu une partie de mon âme et de mon sang à un marchand, vendu pour acheter un coin de terre bénite. O pauvreté ! La dépouille mortelle de ma mère ne pouvait être honorée que par le déshonneur de ma Muse » (Stern, 1846 : 125).
A l’esprit du peuple, la mère-auteure et la prostitution vont dans le sens identique et la prostitution à laquelle elle est accusée n’est pas que dans le sens figuratif du mot : « On leur a fréquemment reproché d’user de leurs charmes pour parvenir à des relations, à la publication, à décrocher des prix ou des récompenses, les assimilant à des prostituées, ou à des femmes galantes et des demi-mondaines » (Planté, 1989 : 195).
De ce que Planté déclare, on peut apprendre pour quelle raison Liszt a refusé de reconnaître, dans le roman de Marie d’Agoult, sa figure [2] « à peine voilée » (Mazenod et Schoeller, 1987 : 169-170). Il ne voulait pas voir le succès de la romancière s’éclipser sous l’éclat de sa figure de grand musicien. Sa présence dans le roman pourrait signifier que la romancière aurait profité de la protection d’un homme qui est aussi le père de ses enfants.
Aussi, la maternité, est-t-elle mise en question à partir de sa double dimension : la maternité de l’œuvre littéraire et la maternité dans l’ordre familiale. Que peut apporter un nom à une mère-auteure, lorsque l’on ne sait à quelle sexualité revient la maternité et/ou la paternité d’un ouvrage littéraire ? Susciter une telle question dans l’esprit du lecteur cadre bien avec la pseudonymie et l’inversion anagrammatique du titre. Les deux, étant les stratégies de signature, conduisent aux visions socio-historique et scientifique qui raturent le visage de la mère-auteure.
Pseudonymie : une coquille vide
Les découvertes médicales des années quarante proposent une vision naturaliste qui dénonce une altérité radicale au corps et à la mentalité de l’être féminin. L’argument débute à partir d’une déchirure qui, comme un trait substantiel à la nature féminine, engendre non seulement son corps mais aussi sa mentalité et son état psychique. Elle permet à la femme d’enfanter, mais lui refuse cependant la possibilité de créations culturelle, poétique, philosophique, scientifique ou historique. De tel constat biologique et psychologique résulte l’incompatibilité entre la nature de l’écriture et celle de la maternité. D’où se ressent, chez la mère-auteure, le besoin d’un nom d’homme pour attribuer une originalité paternelle à l’œuvre littéraire. La prise d’un masculin nom de plume prend sa racine dans la célèbre métaphore "pen-penis-pencil". Ceci explique qu’il se renvoie à l’homme le pouvoir de faire vivre une idée, lui donner forme et l’existence. Ainsi, non en termes de la maternité, mais c’est au nom de la paternité littéraire – comme les autres domaines de l’art et science – qu’est justifiée toute légitimité de création. C’est à la femme d’accoucher des enfants, procréation, et à l’homme d’accoucher des livres, création (Del Lungo et Louichon, 2013 : 236). Ceci présuppose l’aridité littéraire de la femme-auteur [3] et son incapacité d’assumer la maternité d’une œuvre intellectuelle. Dans cette logique, le pseudonyme sternien s’éloigne, au moins apparemment et autant que possible, des indices révélateurs du sexe faible : Mme d’Agoult, par le nom de plume qui emblématise un « esprit très-sec », incarne « la raison, l'abstraction, la métaphysique » (D’Aurevilly, 1878 : 65-66). « Stern » signifiant "difficile" en anglais, représente le sexe dur et comme « le choix des pseudonymes s’explique par le genre littéraire exercé » (Martens, 2017 : 282), toutes les œuvres de Mme d’Agoult, montrent son aspiration aux sujets extrêmement sérieux auxquels fait écho le choix de son nom littéraire. Il va de même pour sa « sérieuse Nélida » (Stern, 1849 : 29) qui « sut voir d’un œil sévère toute étendue d[u] mal » (Stern, 1849 : 137). D’« une solidité et [d’] une vigueur rare chez une femme » (Stern, 1849 : 170), ne sort que la sécheresse littéraire dont on voit les traces dans le statut social de la mère-auteure qui ne saura jamais transmettre la gloire à sa famille, par le biais de son nom, ni garder son lien maternel avec ses enfants, même si elle s’inscrit dans la lignée des élites. Au contraire, c’est à partir de son enfant que se définie son identité. En témoignent les teknonymes[4] dont l’emploi se fréquente à l’entrée de l’Age moderne. Dans notre roman, c’est Faustina, qui « en l’appelant pour la 1ère fois par son nom de jeune fille » rappelle à la protagoniste qu’elle n’est jamais respectée de par l’identité qu’elle tient de sa famille parentale. De ce regard sexué qui atteint l’état onomastique d’une fille et /ou d’une femme, se résulte une identité instable, sur le point de disparaître à tout moment, dans le cas du mariage, du divorce ou du veuvage (Stern, 1849 : 252). Dès son mariage et voire lors du veuvage, Nélida est appelée de son nom marital. Elle est la porte-parole de l’écrivain de même qu’elle représente l’état typique de la femme de la France du XIXe en ce qui est l’état onomastique.
L’identité féminine, construite durant le célibat, sera sujette à la transformation identitaire. Et cette transformation continue à s’imposer dans l’échelle de l’état civil. Ainsi, le nom paternel donne la place au nom conjugal. Ce qui reste à la femme, c’est une déchirure physique et identitaire, une discontinuité dans l’ordre familial et une non-unité dans l’ordre de l’identité sociale. Ceci lui rend impossible d’exposer une individualité stable d’elle-même. L’identité qui faillit à tout moment risquer la singularité devient à tout moment requalifiable ; et ce qui est requalifiable est radicalement « inqualifiable de prétention » (Stern, 1849 : 209) ; il s’agit donc d’ôter la singularité à la mère-auteure et la rendre l’objet de dépersonnification. Tout cela l’amène à se donner un nom masculin. Au fait, cette stratégie onomastique suit deux buts simultanés : se dissimuler et apparaitre parmi les écrivains. Toute l’œuvre sternienne, par le billet des titres -"Daniel" et "Nélida"- enregistrés sur la couverture du livre, sera donc le rejet de cette accusation que Marie d’Agoult aurait voulu sacrifier la maternité à l’écriture. Dès l’entrée du roman, par le titre, le lecteur prend conscience d’un acte de refus de la féminité et une tendance simultanée aux affections maternelles. A ceci l’écrivain choisit l’anagramme du prénom de son fils pour la protagoniste qu’elle aurait pu nommer, tout simplement, "Daniella", forme féminine du Daniel. Si elle avait ainsi titré son roman, elle n’aurait légitimé sa position sociale en tant que la mère-auteure. C’est dire qu’un tel choix ne pourrait pas évoquer si fortement le statut inexistant d’une mère-auteure dans la société de lettres. Cette dernière remarque n’épuise pas le champ possible du choix du titre certes, mais c’est l’un des potentiels qui pourrait s’actualiser au cours du procès de la lecture. De tous les enjeux conflictuels que suppose le statut de la femme-auteur, la maternité semble le point cardinal qui justifie l’écriture anonyme et la lecture anagrammatique du roman intitulé Nélida. Par cette intitulation, Marie d’Agoult, non seulement fait revivre son défunt fils mais aussi fait renaître la femme artiste qui se meurt en elle.
Renaissance d’une mère-auteure
Lorsque la femme-auteur occupe la position maternelle, toutes les raisons se présentent pour la paralyser dans ses tâches intellectuelles car l’acte d’écrire, objectif de la femme de lettres, va à l’encontre de la prédilection du siècle pour le rôle maternel. Si le succès littéraire lui fait goûter la gloire, « ce n’[est] plus pour rester fidèle à un autre, c’est pour se rester fidèle à elle-même » (Stern, 1846 : 190) qu’elle va désormais consacrer son temps à épanouir ses talents et réaliser ses rêves. Elle tourne son attention de sa famille et se préoccupe alors de ses exigences personnelles : « On apprend à bien penser comme on apprend à bien coudre » (Stern, 1880 : 42). Il en est pour l’ordre social :
« La supériorité d’esprit chez une femme est un phénomène trop rare encore pour ne pas exciter la défiance du vulgaire […] c’est une supériorité inquiète, armée, et qui use à se défendre elle-même les forces qu’elle devrait consacrer utilement au bien de la famille et de la société » (Stern, 1849 : 68).
Mais l’esprit de l’époque exige autre chose : les manuscrits d’une mère-auteure doivent garder un caractère privé et familial et elle n’a pas moralement le droit de donner une dimension publique à ses écrits[5].
C’est par le dévouement silencieux, sans qu’il y ait la question de la virtuosité maternelle, que Marie d’Agoult prend la plume, mais donne la parole à son fils:
« A cette vie domestique de la mère entièrement refermée sur la maisonnée mais ouverte aux regards à l’intérieur de celle-ci, s’oppose la vie secrète de la femme à la recherche d’elle-même, qui ne se satisfait pas d’une existence réduite à la conjugalité et à la maternité. Cette vie secrète échappe au mari, qui peut ne pas même l’envisager – pas davantage qu’il ne reconnaît à sa femme une identité personnelle […] Pour protéger l’individu contre le risque de se confondre avec les autres, il n’est de meilleur moyen que la possession d’un secret qu’il veut ou qu’il lui faut garder » (Heinich, 1996 : 118).
Marie d’Agoult, elle aussi est supérieure à ses semblables autant que sa protagoniste est exceptionnelle ; « la comparer à d’autres femmes, c’était lui assigner un rang, une place parmi elles » (Stern, 1846 : 158-159). Mais la romancière est incapable d’assumer le rôle maternel surtout qu’elle finit par échouer dans la vie conjugale. Voire le sentiment maternel qui lui dicte son pseudonyme, ne peut lui attirer l’indulgence des critiques. La tonalité ironique qu’elle prend pour parler du fonctionnement du lait d’une mère philosophe, ne lui rend pas sa figure féminine :
« Elle diminue les mères. Les devoirs de la maternité, dit-elle, sont compatibles avec les grandes pensées. Une mère en allaitant son fils peut rêver avec Platon et méditer avec Descartes. […] Elle assure même assez drolatiquement que le lait n'en sera pas plus mauvais, ce qui dépend, du reste, de la force de la méditation ou de l'ardeur de la rêverie » (D’Aurevilly, 1878 : 70).
Bref, la mère qui écrit, revendique ses droits individuels. Ayant mis le foyer en péril, elle va conduire la famille au désordre : chose à empêcher car tant la famille, la cellule basique de la société, reste sainte et intacte, l’humanité sera garantie. Barbey d’Aurevilly considère la mère-auteure comme héritière d’Eve et son écriture « péché mortel à sa nature et [à]sa fonction sociale » (1878 : 24). Il va plus loin dans sa condamnation idéologique déclarant qu’une mère qui écrit constitue un facteur de désordre social et surtout moral.
Contrairement à la protagoniste « qui était presque réconcilière avec la pensée de paraître en public » (Stern, 1846 : 153), l’auteur sans oser s’y faire voir ouvertement, s’audace de plus en plus invisiblement dès la page du titre, à s’afficher à travers une fausse posture masculine. Cette conception de la mère-auteure est bien accueillie parmi le peuple. Voici l’exemple d’une lectrice qui déclare sa méfiance à l’égard d’une mère, qui commet à écrire : «L’auteur à cheveux maintenant gris [il s’agit de George Sand], est une mère qui a à son nom un homme qui est un fils ». On lit également au sujet de Louise Colet : « Une mère, hélas […] calme, souriante, est venue nous initier au mystère de ses nuits, nous montrer ses lèvres humides encore de baisers » (Planté, 1989 : 89).
La position maternelle est plus antagonique à la création littéraire. En effet, une mère ne crée pas d’œuvre puisqu’elle a déjà créé son chef d’œuvre : ses enfants et plus particulièrement son fils. Ainsi, Marie d’Agoult se passe à son véritable nom pour ne pas entacher la réputation de son fils :
« Il semble que les mères des grands hommes n’écrivent pas : leur œuvre, unique et grandiose, sera leur fils. Une croyance populaire reprise et systématisée par de nombreux écrivains, Michelet en tête, voit d’ailleurs dans les génies des" fils de leur mère". […] Pour flétrir les femmes auteurs dans leur impudeur et leur immoralité, les détracteurs ne manquent pas de leur rappeler leur qualité de femmes et de mère, et qu’un jour leur fils (car c’est toujours les fils qu’il est question en ces circonstances) auront à rougir de leurs écrits » (Planté, 1889 : 135).
Mme d’Agoult aussi, par le titraille de son livre, ose exposer sa figure coquette d’une maîtresse hors-mariage, certes, mais nous voyons également, dans cet acte, la volonté de se libérer des malédictions sociales (Harvey, 2017). Cette mère qui renonce à signer son œuvre de son vrai nom, pour se débarrasser des croyances populaires et se mettre à l’abri de l’enfant, crée d’abord, une protagoniste, l’appelle "Nélida" et puis circonscrit le champ de son travestissement littéraire dans la maternité.
Allons plus loin dans le domaine idéologique, en acceptant qu’une telle stratégie prise par une auteure avant-garde telle qu’elle est Marie d’Agoult, peut anticiper le féminisme dit « maternel » ; l’un des visages variés du féminisme naissant du XIXe siècle. Cette version du féminisme pourrait, au moins, témoigner d’une condescendance pour la femme en question de notre recherche et celles d’autres qui ont probablement choisi leur pseudonyme sous l’influence de leur sentiment maternel.[6] Le "féminisme maternel" utilise du potentiel de mère pour lui fournir un refuge à son sexe considérant que la maternité donne une redéfinition physique et psychologique de femme. Cette vision est accueillie comme moyen de protéger des mères intellectuelles dans la société. Or la dame déguisée de notre recherche et son fils, coexistent dans les titres affichés sur le livre : "Daniel" et "Nélida" : Les hypothèses contenues dans cette double titraille conduisent le lecteur à y trouver des contraintes que la mère-auteure surmonte pour se présenter au lecteur en tant qu’une personnalité respectable. Pour ainsi dire, l’absence de tout statut social pour la femme-auteur la prive d’« un nom respecté » (Stern, 1846 : 176) et lui ôte tout droit à l’originalité de son œuvre :
« À partir du moment où l’œuvre à commenter est une œuvre de femme, où cette femme n’est pas protégée par un statut social d’exception, le travail du commentaire critique apparaît au mieux comme une entreprise de légitimation, au pire comme une entreprise de délégitimation : lui dénie la maternité de son œuvre » (Clément, 2010 : 80).
Le nom d’auteur affiché, dès la page de titre, lui fournit une identité littéraire, mais peut-il lui concéder une identité sociale ? La réponse à cette question est en grande partie négative car l’identité sociale de la femme-auteur en général et celle de la mère-auteure en particulier sont sujettes à une mise en doute continuelle.
Quant à l’héroïne du roman, l’idée de se fournir une identité publique germe à son esprit, lorsqu’elle retrouve un copain d’enfance devenu artiste « fier du nom qu’il portait » (Stern, 1846 : 110). Elle prend désormais une lucide conscience d’elle-même : « La femme qui avait été son esclave s’était affranchie, et, si elle consentait à porter encore ses chaînes, ce n’était plus avec aveuglement, c’était avec conscience » (Stern, 1846 : 19).
Elle trouve le mariage, ainsi que l’amour, l’une des forces aliénantes que la société virile impose à la femme. Lorsque Nélida perd son mari, elle renonce au remariage ayant peur de retomber de nouveau dans le piège de dépendance : « C’était le renoncement presque certain à l’expansion de ma force, à ce rayonnement de ma vie sur d’autres vies […]. Le mariage, c’était le ménage, le gynécée, la vie des salons » (Stern, 1846 : 213).
C’est après la mort de son mari qu’elle retourne à la lecture (Stern, 1846 : 128), et qu’elle repense à la réalisation de ses talents : « Le rôle sérieux qu’une personne de mon sexe avait pu jouer […] Les femmes pouvaient donc aussi être grandes, fortes, être quelque chose enfin » (Stern, 1846 : 207-208). Et dans un autre passage nous lisons : « Mon cœur ne battait déjà plus qu’à l’idée d’une grande destinée » (Stern, 1846 : 212).
Ne voulant plus se donner au sacrifice, elle opte plutôt pour une marginalité volontaire. Mme d’Agoult établit une comparaison minutieuse et explicite entre la femme au talent artistique et son camarade au sexe opposé, celui qui
« ne possèd[e] que la force d’expansion. La force de concentration, celle qui fait les philosophes, les grands caractères, et les véritables artistes, lui manqu[e…], incapable de concevoir un ordre général et de s’y assigner sa place [dans] l’exercice matériel de son art […] sans méthode et sans choix, [ainsi] Il résolut de ne pas risquer l’audacieux défi qu’il voulait jeter à la société, avant de s’être fait un nom qui le revêtit d’une force suffisante pour engager la lutte à armes égales » (Stern, 1846 : 130-131).
Voilà que la femme-artiste prend « conscience des inégalités sociales » et se trouve, contrairement à l’homme, toute capable de « parle[r] de son amour en poète et de ses erreurs en philosophe » (Stern, 1846 : 251). L’attitude de Nélida témoigne également d’une prise de conscience de la femme artiste désespérée d’une société qui ne veut pas se changer dans ses idées dogmatiques. Elle décide pourtant de se consacrer à l’action sociale. Par cette fin socialiste, Wilwerth le jouge : « Un roman porteur d’espoir, qui présente une formidable naissance à soi-même. Une œuvre bien construite, attachante, émouvante même dans la mesure où la fiction émane directement des réalités du XIXe » (1987 : 169-170).
Cette socialité de la mère-auteure ne doit pas pourtant nuire à sa sociabilité. Pour éviter ce risque, elle opte pour une fausse identité littéraire car l’identité littéraire n’est pas la seule identité sociale.
Lecture à rebours
Dans ses choix titrologiques, Marie d’Agoult se rend le plus service de l’écartèlement qui est l’une des caractéristiques de l’écriture pseudonymique. N.E.L.I.D.A « harcelaient son esprit » (Stern, 1846 : 247), son sentiment et son corps ; car : « Autant les femmes de plaisir sont inintelligentes des douleurs morales, dont elles ont horreur, autant elles sont d’instinct charitables et compatissantes aux maux physiques » (Stern, 1846 : 257).
Le roman par le titre évoque le renversement ; « l’intrigue de Nélida joue sur des lettres, des billets ou le viol d’un journal intime » (Vanden Abeele, 2010). L’anagramme conduit le roman dans le sens de montrer l’incompatibilité existante entre l’acte d’écrire et l’identité authentique de la mère-auteure. Le travestissement se fixe au niveau du nom sans qu’il soit la thématique du roman. Nélida trace un cheminement disparate : il va de l’amalgame de sujets à l’anagramme du titre. Il présente l’idée de déconstruction comme une thématique pertinente à l’œuvre, avec cette particularité qu’il rejoint celle de la maternité. Le titre, avec son côté doublement autobiographique, donne à une analyse extralittéraire de la vie de l’écrivain aussi bien que de la société actuelle. Marie suggère effectivement ses chagrins maternels à travers le titre tout en dénonçant la « fausse marche » (Stern, 1846 : 86) qui déroute la société. Une lecture anagrammatique du roman dévoilera, en effet, les pratiques sociales qui vont dans le sens inverse. L’écrivain reprend son prénom littéraire à l’aide d’une inversion onomastique, et cela dans le but de dévoiler une société qui contredit la femme, car cette créature n’est qu’une « belle aveugle aux yeux ouverts, qui passe à travers la réalité du monde en croisant sur sa poitrine les plis de son voile » (Stern, 1846 : 79) ; le voile qui l’étouffe. Une société apte de supporter l’analyse féminine des choses, de « rapprocher de plus en plus […] de l’idéal divin » (Stern, 1846 : 245), sera-t-elle « le rêve de toutes les femmes capables de concevoir l’idéal [sans] y respirer, mouette et voilée, le pur encens du sacrifice » (Stern, 1846 : 62-63).La réalisation de cette utopie féminine, est mise en question dès la titraille et à l’entrée du livre.
Daniel, tout compris, est un pseudonyme maternel. Cet alias renforce l’idée de masculinité qui n’empêche pas toutefois de suggérer les sentiments maternels de l’auteur. Ce sentiment est omniprésent chez Daniel Stern qui emprunte son prénom de son fils, le prêtant à nouveau à son ouvrage. En cela, la romancière reste dans la lignée familiale mais elle en sort à la fois car son nom de plume évoque une relation hors conjugal. Si Nélida est le double de Marie d’Agoult en amour scandaleux, mère Sainte-Élisabeth l’est en sentiments non-consumés d’une femme élite (Stern, 1846 : 212-213). Pour lui faire "consentir à vivre" (Stern, 1846 : 224), mère-Élisabeth confie l’histoire de sa vie à Nélida, qu’elle considère comme cher enfant qu’elle n’a jamais eu. Elle raconte la triste histoire de l’avortement et de l’infanticide. La thématique criminogène que la romancière aborde d’une manière implicite ; sinon, elle suivrait le danger de mettre en cause le Code Napoléonien qui n’envisage que des condamnations aux femmes et qui laisse passer les hommes ; tandis que ceux-ci sont également complices dans les cas de crimes : « Les enfants et un peu aussi les artistes, [ici les hommes] ne sont pas toujours responsables de leurs actes » (Stern, 1846 : 59). Si la société ne charge pas les hommes de leurs actions criminelles, l’auteure aussi montre, par le choix anagrammatique du titre, sa passivité par rapport au regard sexué du peuple qui ne la respecte pas, ni son fils illégitime, dans son intégrité. Cette passivité recherchée augmente dans l’écriture anonyme où l’écrivain n’assume pas l’authenticité de sa signature. Ainsi, l’approche onomastique que Marie d’Agoult fait au titre, nous rassure d’une intelligence féminine, consciente de l’incompatibilité entre la maternité et la carrière de lettres. Cette conscience la pousse à choisir une posture masculine pendant la vie privée et cela afin de couvrir une activité professionnelle qui prend parfois des directions fortement politiques.
Nélida pourtant est une autobiographie à la troisième personne. Le titre implicite, à l’amblé, un « "nous" qui rétabli[t] l’idée d’égalité, presque d’intimité » (Stern, 1846 : 58), entre les amants aussi bien qu’entre la mère-auteure et son fils. Ce "nous", prenant le titre en considération, favorise davantage la passivité du lecteur misogyne et l’activité de la mère-auteure. Tout le roman, devient la mise en scène de la « maternité » dont le lecteur sera appelé à en décoder les éléments du discours interrompus et repris selon les besoins de la création d’un horizon d’attente ; l’horizon d’une mèreintellectuelle qui est à la recherche d’une position sociale. Il énonce l’adhésion entre l’énonciateur et l’énonciataire, entre le lecteur et l’auteure masquée dans leur interaction avec la société bouleversée.En cela le pseudonyme sternien fait écho au nom de la protagoniste et à son sentiment maternel qu’elle n’a pas accompli à l’égard de son fils et qu’elle ne trouve la place d’achèvement que « sur cette page morte » (Stern, 1846 : 253). Il semble que la pseudonymie est un acte défensif ou plutôt une « résignation feinte » (Stern, 1846 : 120) : une mère balbutie le nom de son fils car elle se sent impuissante de se défendre contre l’accusation d’avoir déshonoré son fils en publiant une œuvre littéraire. "Nélida" et "Daniel", juxtaposés sur la couverture du livre, définissent le texte autonome au niveau du sexe. Et c’est la manière dont Marie d’Agoult va mettre la maternité en accord avec la légitimité littéraire. L’absence du "je féminin", donne à lire le récit, comme si c’était écrit par un homme, et pour ainsi dire, elle peut se faire entendre auprès du public sans susciter de parti pris contre. Alors ce nom viril, comme tout autre pseudonyme, ne désigne que des « instances anonymes, pures instances de focalisation » (Martens, 2017 : 271). Il en est de même pour le public : plus l’énonciatrice est muette, plus l’analyse de son œuvre pseudonymique s’autonome des jugements sexués du lecteur. La présence du "je féminin" dans les romans des femmes est une bonne excuse pour justifier la statique de leurs œuvres – du fait qu’elles n’encouragent guère le lecteur à aller vers de nouvelles pistes de lecture.
Laura Locombo trouve dans ce sujet énonciatif, c’est –à-dire dans ce "nous", employé par des femmes, à la fois leur modestie, leur spontanéité et, d’une manière sournoise, l’originalité de leurs œuvres. Aux yeux de Lacombo cette "spontanéité" suggère une certaine originalité de la part du génie féminin (Del Lungo et Louichon, 2013 : 253). Pourtant sur le plan sémantique, les dénotations et connotations du choix onomastique sont au détriment du personnage féminin. Vu que « tout pseudonyme peut se concevoir non seulement comme le faux nom d’un auteur "réel" mais aussi comme le nom véritable d’un auteur fictif » (Martens, 2017 : 239), l’auteure dénie son sexe pour déléguer la narration à un narrateur neutralisé de sexe. Ainsi, la fonction du "je" qui adopte des ressorts associés à des thématiques féminines, se met en doute dans le roman sternien où la femme, sous l’effet de honte, n’ose revendiquer le droit à son œuvre qu’en usurpant l’identité de l’autre sexe, celui de son fils. C’est ainsi que la parole partagée avec le public donne la place à l’écriture confiée au fils. Les instances énonciative et narrative seront désormais fondées sur une base déjà évacuée de toute identité civique ; une fois les éléments du discours invalidés, s’empare le métadiscours qui serait, en l’occurrence, au sujet de la profession d’écrivain en contradiction avec le dévouement maternel, modèle archétypique de la grandeur féminine qui impose une retraite volontaire aux mères dévouées. La mère-auteure qui reprend le nom de son enfant, choisit en effet un énonciateur masculin pour conduire son récit, et cet énonciateur n’est que son fils. Et c’est là où se trouvent exactement le secret et la singularité de l’œuvre.
Or à partir du moment où le lecteur apprend qu’il s’agit d’une configuration masquée d’une mère-auteure et un enfant illégitime d’une relation hors-mariage, il se donne à une lecture à rebours cherchant, dans l’auteure, le double inversé de la protagoniste. Toute l’action du roman semble alors redoublée : la vie du personnage principal trouve son reflet dans la vie de l’écrivain, avec cet accent qu’on peut y reconnaître la présence d’un être cher à l’ombre duquel la mère-auteure se donne à l’écriture. On ne sait vraiment quelle place y occupe la femme écrivain et son fils ? Qui se sacrifie, parmi eux, à la norme sexuée et qui s’en bénéficie ? Ainsi, l’indentification entre la mère et le fils une fois établie, le lecteur se propose une lecture double du texte. Tout en voulant recevoir l’œuvre en tant que la biographie de l’auteure, il la concède au personnage du roman qui n’est plus Nélida mais c’est Daniel Liszt. Quand il apprend qu’il s’agit d’une romancière femme, il constate de son double : une femme artiste qui est divisée entre la peur d'être considérées comme une mère insoucieuse et le désir de gagner la singularité d’un écrivain. Surgit alors la figure d’une femme autonome qui revendique ses droits à tout prix. En effet, ce que Marie d’Agoult parcourt dans sa conception de la maternité, c’est la voie d’une femme trop romancée à une femme à la recherche de l’indépendance identitaire. Ainsi, le lecteur se retrouve sur le passage d’une femme révoltée à une mère dévouée.
Conclusion
Dans ce roman, les faits se remplacent par la description minutieuse des sentiments blessés d’ « une de ces femmes qui peuvent mourir d’amour » (Stern, 1846 : 165). Le roman est si simple que le titre, dans son rapport avec le faux nom de l’auteure, dissimulant son sexe, en constitue presque la seule intrigue. Le titre de ce roman met en évidence la question du nom propre et son importance identitaire. D’un côté le roman, par son titre, intrigue le lecteur à identifier le personnage éponyme de l’histoire et de l’autre, il met cette quête identitaire en suspension. Cette suspension se renforce par le choix des titres onomastiques qui conduit également à l’abolition des images stéréotypées de la mère-auteure dont la présence sociale se confirme quand son pseudonyme masculin juxtapose le titre du roman. De telle association du choix onomastique du personnage à la quête identitaire de l’auteur, se dégage un autre potentiel de l’écriture anagrammatique en tant que dénonciatrice des fausses valeurs de l’actualité sociale. Nélida dans son traitement des pseudo-valeurs porte le focus sur plusieurs thèmes féminins mais exprime aussi l’anathème que la mère-auteure s’attire par l’acte d’écrire. Alors que certains peuvent interpréter l’acte pseudonymique et le choix anagrammatique de la titraille, comme une autocensure de la part de l’écrivain, cette double stratégie garantit une sorte de liberté dans l’expression. Le roman représente, à sa propre manière, la renaissance d'une mère-artiste qui est l’objet de toute une curiosité publique, par sa vie privée, son divorce et sa relation extraconjugale. L’échec sentimental, sous forme de mariage, séparation ou abandon, tout ce que Nathalie Heinich relève pour les femmes-auteurs comme « une quasi-constante de[s] passages à l’écriture » (1996 : 309-310), explique l’utilité d’un masque social qu’est « une résolution, héroïque pour une femme » (Stern, 1846 : 257). Le narrateur surgit par une question pour finaliser le roman d’un accord maternel : « Que devint Nélida ? » (Stern, 1846 : 263). La réponse bien prometteuse : Nélida, sera reconnue « l’enfant de [l’] adoption » (Stern, 1846 : 175), et Marie donc, sous sa représentation masculine, la "mère adoptive" de son œuvre. Elle souhaite retoucher le visage de la mère qui risque de se commettre avec l’écriture. Si l’acte d’écrire exige une créativité intellectuelle, la femme, et plus particulièrement la mère, en est plus digne que l’homme; car grâce à sa capacité d’enfanter, celle-ci est plus proche à la source originelle de la création.
[1] Remarquons les critiques portées à Mme Babois pour ses Elégies maternelles qu’elle avait écrites à l’occasion de la mort de sa fille et pour lesquelles elle se voit obligée de chercher des justifications. Ou encore l’histoire d’amour et des querelles avec des amants célèbres publiés par George Sand, Louis Colet, Daniel Stern ou Hortense Allart de Méritens, tout ce qui suscite la fâcheuse curiosité du peuple.
[2] Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9lida
[3] L’hybride "femme-auteur", dicte une incompatibilité entre la féminité et l’intellectualité et dénonce aussi la tendance forte de l’époque à refuser toute féminisation de la profession d’écrivain. En cela, la construction résiste à sa forme féminine "femme-auteure". Au contraire, la construction « mère-auteure », mise en féminin, équivoque la fécondité de la femme-auteur quand celle-ci usurpe, à la déguise de l’époque, la place de l’homme de lettres.
[4] Teknonyme : nom adopté par un parent pour signifier sa relation à un enfant (père ou mère de…).
[5] Lamartine par exemple a réagi gravement contre la publication des écrits de sa mère.
[6] Dont Léodile Béra-Champseix qui colle les prénoms de ses jumeaux pour construire son nom de plume : André-Léo.