نوع مقاله : مقاله پژوهشی
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دانشگاه علامه طباطبائی
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Introduction
Suite aux tentatives de l’État iranien au XIXe siècle pour gagner le savoir occidental, le pays ouvre ses portes à la réception des sciences et littératures européennes. La fondation de Dal ol-Fonun et l’installation de l’imprimerie, les premiers fruits de cette ouverture, vont susciter la pratique de la traduction comme le moyen le plus directe d’accéder aux sources étrangères. Attirés par l’originalité et la nouveauté de la littérature française, les Iraniens font une réception chaleureuse à celle-ci et commencent d’emblée à intégrer les genres inédits comme roman et théâtre dans leur littérature. Sous l’influence de cette réception, certains modernistes mettent en doute les valeurs poétiques et sociales des œuvres des auteurs iraniens et invitent les littérateurs du pays à repenser leur littérature.
Ainsi, on entend pour la première fois le discours de la modernisation littéraire en Iran dans les propos des intellectuelles iraniens, à savoir: Akhondzadeh, Agha khan Kermani, Malkom khan, entre autres, qui, sous l’influence de la littérature française, cherchent une francisation de l’art poétique persan. En effet, le mouvement commence par une mise en valeur de la probité de la littérature française et par l’invitation des auteurs iraniens à chercher une interface entre les deux littératures. À cet égard, en établissant des comparaisons souvent peu approfondies entre la littérature persane et la littérature française, on loue l’universalité de cette dernière et on critique d’une manière sévère la poésie persane, surtout la poésie des contemporains.
À l’évidence, la réalisation d’une telle interférence entre deux littératures avec des particularités historiques, poétiques et sociales, bien distinctes, exigeait des études approfondies des modèles poétiques et des théories appropriées. Mais, dans cette première étape, les intellectuels iraniens négligent les mesures et les démarches nécessaires à ce but, et se contentent seulement des critiques sociales, sans aborder les différences qui pourraient provoquer la résistance à l’établissement de l’interférence entre ces deux littératures.
Cette première tentative se répercute sur d’autres voix et on verra aussitôt la conséquence dans la parution des premières revues iraniennes au cours des premières décennies du XXe siècle. C’est dans ce foyer que les grands littérateurs et auteurs iraniens de l’époque se réunissent pour la première fois et, en s’inspirant de la littérature européenne du XXe siècle, se donnent pour but de trouver les moyens de mondialiser la littérature persane. Dans ce nouveau foyer du modernisme littéraire, les modernistes iraniens reconnaissent la traduction comme le chemin direct pour atteindre la modernité littéraire. C’est sous l’effet de la traduction qu’ils commencent, nous paraphrasons le manifeste de la revue Dâneškadeh, à repenser l’art poétique persan et le style des qodamâs et en s’inspirant des nouveaux mouvements littéraires, eu égard aux attentes de la société, ils espèrent trouver à travers la traduction les moyens pour inspirer l’âme des littératures (européennes) du XXe siècle dans le corps de la littérature persane» (Dâneškadeh, 1917: 2-3).
La revue Bahâr, l’organe du premier groupe cherchant à renouveler la littérature persane, fut publiée durant l’année 1910. La revue Dâneškadeh prend le relais en 1917 et s’engage à encadrer les efforts des modernistes et à trouver la bonne voie pour atteindre l’objectif. Les membres de la première association littéraire en Iran, Association de Dâneškadeh (Jarg-e adabi Dâneškadeh), dans leur revue éponyme présentent à travers leurs recherches et leurs publications, aux futures revues, les modèles à suivre dans la démarche de la modernisation littéraire en Iran Ainsi, la plupart des revues, entre autres, Irânšahr, Âyandeh, Armaqân, prennent part dans cette démarche et essaient d’y apporter leur contribution.
Dans cet article, nous présenterons plus particulièrement la revue Irânšahr, imprimée en Allemagne dont la publication a durée quatre fois de plus que ses revues précédentes. Vu la publication de la revue à Berlin, elle est devenue le premier centre d’échange de recherches entre les Iraniens séjournés en Europe et en Iran. Pour présenter cette revue nous la situons d’abord dans le contexte de l’époque pour faire connaître ses positions littéraires ainsi que ses contributions aux processus de modernisation de la littérature persane, et ensuite, nous en donnons un compte rendu succinct des publications. Avant de mettre en regard la fameuse traduction d’Iraj Mirza, «Qalb-e mâdar», publiée et présentée dans cette revue comme un exemple réussi de l’adaptation du texte étranger, nous présentons ses éventuelles sources étrangères et nous essayons de relever les ressemblances et dissemblances des textes sources et cible. Dans un dernier temps, nous tâchons de faire une analyse comparative des textes pour en dégager les particularités structurelles du poème d’Iraj et la façon dont il recrée ce texte pour qu’il soit adapté à l’horizon d’attente et le goût de ses lecteurs iraniens. L’étude de la structure de cette traduction, nous donnera la possibilité de mesurer sa place, eu égard à la politique de la revue, dans la modernisation littéraire en Iran.
Irânšahr: le porte-parole de la pensée moderne en Iran
Quatre ans après la publication de Dâneškadeh, le premier numéro de la revue Irânšahr paraît le 26 juin 1922. Le rédacteur en chef et éditeur, Hossein Kazemzadeh, prévoit dans son premier éditorial une revue bimensuelle, mais il ne la publie en pratique qu’une fois par mois. La revue est imprimée à Berlin en Allemagne et diffusée dans quarante villes en Iran (Aryanpour, 1993: 234). Kazemzadeh publie cette revue entre les années 1922 et 1926 en quatre séries: 1922-1923, 1923-1924, 1924-1925, 1926-1927. Son édition au sein même de l’Europe donne à la revue un rôle important dans l’établissement et l’élargissement de l’interface culturelle et littéraire entre le savoir et la littérature iraniens et européens. Les rédacteurs et collaborateurs de la revue, vivant en Europe pour la plupart, essayent de faire de leur publication un miroir de la science et de la littérature européennes et ainsi de devenir l'intermédiaire par lequel la pensée moderne pourrait parvenir en Iran.
Irânšahr portant au front l’enseigne, «La revue littéraire et scientifique», se caractérise par la présentation simultanée du savoir et de l’art iraniens et ceux des pays occidentaux. La revue s’intéresse à des domaines divers tels que la littérature, la linguistique, le parcours des hommes célèbres, la philosophie, la sociologie, la technologie ainsi que des thèmes assez originaux et innovants comme Jahân-e zanân (le monde des femmes). La revue garde toujours un bon équilibre entre les articles publiés concernant le monde occidental et le monde iranien. Dans une certaine mesure, elle se veut manifestement un foyer de présentation et de comparaison des productions artistiques, littéraires et scientifiques des deux mondes.
En ce qui concerne la France, il n’est pas simple de faire un bilan des noms d’auteurs, des thèmes évoqués et de la traduction des extraits publiés dans la revue. Cependant, la place qu’occupe ce pays auprès de la revue apparaît clairement dans l’article intitulé, «La situation actuelle en Iran et les conditions de la révolution» (Irânšahr (première année) 1984: 282-296) où Kazemzadeh, l’éditeur en chef de la revue, présente l’Hexagone comme la nation modèle pour les Iraniens. Dans cet article, publié dans la première série de la revue, pour justifier cette affirmation, l’auteur évoque quelques ressemblances historiques entre les deux pays. Il prétend même de constater en Iran la présence de toutes les conditions sociales, culturelles et politiques pareilles à celles qui ont déjà provoqué la Grande Révolution française. Aussi prévoit-il dans un avenir très proche la réalisation d’une révolution à la française en Iran. (Irânšahr (première année), 1984: 286).
À part ce genre d’affirmation qui exprime clairement la politique réformiste de la revue, on suit également dans ses publications l’intention des auteurs de diffuser la pensée et art français[1]. Pour ce qui est de la littérature, la revue applique son programme sous deux rubriques : adabiyât (la littérature) et qesmat-e lesâni (la linguistique); on y trouve une publication sélective de la poésie persane aussi bien classique que contemporaine. Ces textes en vers s’accompagnent souvent d’un petit commentaire mesurant et rappelant leur valeur poétique. Il faut ajouter à ce genre de vers souvent tirés de la poésie classique et des poèmes en prose des (aš’âr-e mansur), qui ressemblent aux traductions libres de la poésie étrangère, comme ce que nous trouvons dans la revue Bahâr. (Irânšahr (4e année),1984 : 253-255) À vrai dire, contrairement à la prose poétique qui est pratiquée dans la tradition littéraire persane par les grands auteurs classiques, on ne connaît pas pour le style de poème en prose de pratiques littéraires dans la prosodie classique persane.
Et pour ce qui est de la littérature étrangère et la politique de ce périodique en vue d’élargir une interférence littéraire entre l’Iran et la France, Irânšahr suit quelques programmes assez originaux à travers lesquels les membres font preuve de leur projet pour contribuer au changement de la littérature persane. Ces programmes se manifestent plutôt à travers les rubriques «mosâbeqe-ye adabi» (Le concours littéraire), «naqd-e adabi» (La critique littéraire) et «nomune-i az adabiyât-e qarb» (un exemple de la littérature de l’Occident).
Avec «naqd-e adabi» (la critique littéraire), on diffuse ou présente les recherches qui sont, d’après la revue, faites selon la méthodologie dite ‘occidentale’. À ce propos, elle publie et met en valeur les recherches publiées en Iran, qui sont souvent inspirées de sources européennes, notamment de sources françaises. En effet, le séjour en Europe des rédacteurs de la revue et leur accès rapide et facile aux sources européennes, leur permettent de faire ce genre de comparaison. Au numéro huit de la troisième série, Mohammad Ghazvini, un collaborateur de la revue habitant à Paris, écrit une longue critique, intitulée «naqd-e adabi» (Critique littéraire), sur l’ouvrage de Zaka ol-Molk, Târix-e Irân (L’histoire de l’Iran), récemment publié en Iran. Dans cet article, l’auteur compare cet ouvrage avec la recherche effectuée par Abbas Eghbal Ashtiani, intitulé «Târix-e adabi» (L'histoire littéraire), précédemment publiée dans la revue Dâneškadeh. Dans sa critique, Ghazvini déprécie la recherche de Zaka ol-Molk pour son manque de méthodologie, mais par contre, il met en valeur la recherche d’Ashtiani pour son originalité et sa méthode de recherche[2] dans lequel, d’après lui, le chercheur a su mener une recherche selon les méthodes nouvelles de recherche (Majale-ye Irânšhar, 1984: 462-478).
Irânšahr publie aussi les traductions de ses lecteurs et surtout les textes inspirés de sources étrangères. Dans la préface de «Un exemple de la littérature de l’Occident», le rédacteur reprend la phrase-clé du manifeste «Marâm-e mâ» (Notre principe) de Mohammad Taghi Bahar dans la revue Dâneškadeh, et ainsi met en évidence le lien théorique et pratique entre ces deux revues.
Dans la révolution littéraire, l'actualisation des idées et des thèmes importe plus que la rénovation de l’expression et de la forme. Il vaut mieux que les lettrés et les poètes iraniens recourent à la traduction et à l’emprunt d'idées des poètes occidentaux; ils doivent découvrir la valeur de la prose et donner de l’importance aux idées et au sens plutôt qu’à l’expression s’ils veulent insuffler une nouvelle âme dans le corps de la littérature persane. Nous attendons d’autres exemples de la littérature occidentale (Irânšhar (3e année), 1984: 462-478).
À vrai dire, la phrase soulignée en gras reprend le principe formulé dans l’éditorial du premier numéro de Dâneškade (voir Dâneškadeh, 1917: 1-5). Et quant à la rubrique, Mosâbeqe-ye adabi (Le concours littéraire), il s’agit d’un programme littéraire dans lequel la revue propose un thème ou une traduction libre d’un poème étranger et elle invite ses lecteurs à s’en inspirer pour composer un poème en conformité avec la prosodie persane. Dans ce concours, le poète qui réussit à composer le meilleur poème sera récompensé d’un prix de la part de la revue. Le lauréat se peut de surcroît se réjouir de la publication de son poème dans la revue.
Compte tenu de la politique de la revue et surtout de son aspiration à la modernisation de la littérature persane, nous tâchons d’analyser les résultats de ce concours poétique.
Iranisation de la poésie étrangère ou la modernisation de la poésie persane
Pour participer à ce concours, Iraj Mirza (1873- 1924), poète contemporain de la revue, compose l’un des plus célèbres poèmes de sa carrière, «Qalb-e mâdar» (Cœur de mère). Irânšahr publie, dans le quatrième numéro de la deuxième série, la traduction libre de trois poèmes, dont « Qalb-e mâdar» (Cœur de mère). La revue invite ensuite les poètes à réécrire ces traductions libres en vers et à les renvoyer pour participer au concours (Irânšhar (2e année, 1984: 226-228). Nous donnons la traduction de l’une de ces textes, signée par une certaine Shabnam, qui correspond à notre étude.
C'était une nuit éclairée par la lune. Les amoureux assis au bord d’un ruisseau se juraient l’amour éternel. La jeune fille était magnifique et le jeune homme était transi d'amour pour elle. «Mon amour! dit-il, doutes-tu encore de la sincérité de mes sentiments? Moi qui me suis dévoué et qui ai sacrifié tout ce que j’ai, même ma richesse la plus chère, mon cœur, pour gagner ton amour.» La jeune fille répondit: «Perdre le cœur sous l’effet de l’amour n’est que le premier pas. Tu as une perle précieuse plus chère que ton cœur à toi, et c’est seulement cette perle qui peut me prouver la sincérité de ton amour. Je te demande cette perle qui n’est autre que le cœur de ta mère. Quand tu me l’auras apporté, je croirai à la sincérité de ton amour et mon cœur sera à toi.»
Cette demande souleva une tempête au fond de l’âme et du cœur du jeune amoureux. Mais la force de l’amour fut plus forte que le sentiment pour la mère et le jeune homme se leva dans un état de folie et alla arracher le cœur de sa mère pour l’apporter à sa bien-aimée. En rentrant, il se précipita tellement qu’il buta et fit rouler le cœur par terre. Une voix s'éleva du cœur qui disait: «Mon enfant! T’es-tu fait mal?» (Pour le texte original en persan, voir Irânšahr (2e année), 1984: 226-227)
Nous ignorons le nombre et les noms des poètes qui ont participé à ce concours, mais la proposition d’Iraj Mirza donnera lieu à un poème qui sera présenté comme un exemple brillant de l’adaptation du texte étranger au persan. Cette traduction sera fréquemment publiée dans les anthologies de poésies persanes.
«Qalb-e mâdar» d’Iraj Mirza
Descendant de la famille Qâdjâr Iraj Mirza surnommé Jalâl ol-Mamalek (La gloire des royaumes), a étudié à Dar ol-Fonun de Tabriz. Sur les conseils et avec le soutien du futur Premier ministre Amir Nezâm Garusi, il apprend le français auprès de Lampre, un enseignant de français à la Cour. Iraj commence son métier de poète à un très jeune âge auprès du diplomate Hassan Garusi. Sa réputation tient pour une grande partie de sa poésie satirique dont il se sert malicieusement pour critiquer les mœurs de sa société. Parfois, sa poésie vise ses propres amis poètes. Dans l’œuvre d’Iraj, on trouve des qaside, qet’e, ghazel et masnavi toujours composés dans le respect total de la prosodie et de la versification persane. Le patriotisme, l’instruction du public, la libération des femmes constituent les thèmes récurrents de l’œuvre poétique de Mirza[3].
Optant pour la forme qet’e pour sa traduction en vers, Iraj Mirzâ retraduit la traduction libre de Shabnam. Cette forme constitue l’une des formes poétiques du système prosodique persan, dérivée du qaside. Qalb-e mâdar (Cœur de mère) est composé selon une organisation métrique régulière avec des dispositions homophoniques suivant le schéma (--- ---a/ --- ---a/…). La traduction comprend en tout 18 vers ou 36 mesrâ’ (semi-vers).
Au contraire de la traduction de Shabnam qui s’ouvre sur une scène romantique de conversation entre les amoureux, Iraj préfère commencer son texte par le message de la bien-aimée pour son amant. Voici le texte d’Iraj Miza suivi de notre traduction en français.
قلب مادر
داد معشوقه به عاشق پیغام |
که کند مادر تو با من جنگ |
هر کجا بیندم از دور کند |
چهره پر چین و جبین پر آژنگ |
با نگاه غضب آلود زند |
بر دل نازک من تیر خدنگ |
از در خانه مرا طرد کند |
همچو سنگ از دهن قَلماسنگ |
مادر سنگدلت تا زنده ست |
شهد در کام من و تست شرنگ |
نشوم یکدل و یک رنگ تو را |
تا نسازی دل او از خون رنگ |
گر تو خواهی به وصالم برسی |
باید این ساعت بی خوف و درنگ |
روی و سینه تنگش بدری |
دل برون آری از ان سینه تنگ |
گرم و خونین به منش باز آری |
تا برد زآینه قلبم زنگ |
عاشق بی خرد ناهنجار |
نه بل آن فاسق بیعصمت و ننگ |
حرمت مادری از یاد ببرد |
خیره از باده و دیوانه ز بنگ |
رفت و مادر را افکند به خاک |
سینه بدرید و دل آورد به چنگ |
قصد سر منرل معشوق نمود |
دل مادر به کفش چون نارنگ |
از قضا خورد دم در به زمین |
واندکی سوده شد او را آرنگ |
وان دل گرم که جان داشت هنوز |
اوفتاد از کف آن بیفرهنگ |
از زمین باز چو برخاست نمود |
پی برداشتن آن آهنگ |
دید کز آن دل آغشته به خون |
آید آهسته برون این آهنگ: |
آه دست پسرم یافت خراش! |
آخ پای پسرم خورد به سنگ! |
(Iraj Mirza, 1963: 193)
Qalb-e mâdar (Cœur de mère)
La bien-aimée donna un message à son amant:
Votre mère est en guerre avec moi ;
Partout, dès qu’elle me voit de loin,
elle fronce les sourcils et plisse le front.
Avec son regard furieux elle blesse
mon cœur ému par des flèches acérées.
Comme si elle lançait une pierre à la fronde
elle me chasse de sa maison.
La douceur est amertume dans notre vie
tant que ta cruelle mère est en vie.
Je ne verrai mon cœur joindre le tien
que quand tu auras maculé de sang le sien.
Si tu veux gagner mon amour
à cet instant, sans crainte, sans hésitation,
tu dois aller déchirer sa poitrine
pour lui arracher le cœur et
me le ramener chaud et plein de sang.
Voilà ce qui peut polir le miroir de mon cœur.
L’amant insane, ayant perdu la raison,
non, l’homme indigne et sans vergogne
alors ivre et intoxiqué d’opium
oublia le respect dû à sa mère.
Il se rendit chez sa mère et la fit rouler par terre.
Il lui déchira la poitrine et lui arracha le cœur.
Il courut pour rejoindre son amour,
le cœur de sa mère dans les mains comme une orange.
Le jeune homme à la sortie tomba
et un peu au coude se blessa.
Le cœur chaud étant encore vivant
tomba des mains de cet homme cruel
En se relevant pour
aller reprendre le cœur,
il entendit le cœur sanglant
qui gémissait en répétant cette douce mélodie :
Malheur à moi! Mon fils s'est blessé la main !
Malheur à moi! Contre une pierre, il s’est cogné le pied.
Gholam-Hossein Youssefi, critique et spécialiste de la poésie persane, met en valeur «Qalbe- mâdar» ainsi: «il est difficile de trouver un collégien ou un lycéen [en Iran] qui n’ait pas entendu plusieurs fois ce poème. […] Dans les cérémonies culturelles, «Qalb-e mâdar» fait partie des poèmes toujours déclamés» (Youssefi, 2009: 364). Étant donné le nombre des analyses faites sur ce poème, il n’est donc pas insensé de reconnaitre ce poème comme un exemple réussi de poésie contemporaine. Nous nous penchons sur cette poésie et ses sources.
Les sources de «Qalb-e mâdar»
Le premier chercheur qui s’est interrogé sur l’origine de ce poème fut Mohammad-Jafar Mahjub, l’un des éditeurs de l’œuvre d’Iraj Mirza. Dans la première édition, Mahjub suppose une origine allemande, (Iraj Mirza, 1963: 272), et dans une nouvelle édition (Iraj Mirza, 1989), il associe la source de ce poème à une chanson folklorique française. Pour l’origine allemande de ce texte, Mahjub se rapporte à la traduction de Shabnam, citée plus haut. Et quant à la chanson folklorique évoquée par ce chercheur, on la trouve à la fin du roman, La Glu de Jean Richepin (1849-1926).
Y avait un’fois un pauv’gas,
Et lon lan laire’
Et lon lan la,
Y avait un’fois un pauv’gas
Qu’aimait cell’ qui n’laimait pas.
Ell’ lui dit: Apport’ moi d’main,
Et lon lan laire,
Et lon lan la,
Ell’ lui dit: Apport’ moi d’main
L’cœur de ta mèr’ pour mon chien.
Va chez sa mère et la tue,
Et lon lan laire,
Et lon lan la,
Va chez sa mère et la tue,
Lui prit l’cœur et s’en courut.
Comme il courait, il tomba,
Et lon lan laire,
Et lon lan la,
Comme il courait, il tomba,
Et par terre l’cœur roula.
Et pendant que l’cœur roulait,
Et lon lan laire,
Et lon lan la,
Et pendant que l’cœur roulait,
Entendit l’cœur qui parlait.
Et l’cœur disait en pleurant,
Et lon lan laire,
Et lon lan la,
Et l’cœur disait en pleurant:
T’es-tu fait mal, mon enfant? (Richepin, 1881 124)
En effet, trois chercheurs iraniens analysent «Qalb-e mâdar». Mahjub, éditeur de l’œuvre d’Iraj, compare ce poème avec la chanson de Richepin et conclut que «la chanson de Richepin est dépourvue des qualités par rapport à la version d’Iraj» (Iraj Mirza, 1989: 17). Gholam Hossein Youssefi, en louant le poète pour sa traduction et en rappelant les valeurs stylistiques et morales de son texte, le qualifie de «poète vénérant la mère»). Ce spécialiste affirme que «Qalb-e mâdar» est par rapport au texte allemand plus fort et plus joli. D’après lui, dans l’œuvre poétique d’Iraj, ce poème reste, sans aucun doute, le plus précieux et le plus mémorable. Pour lui, ce poème est d’une force qu’il reste impérissable et qui sera lu et récité par les Iraniens tant que la mère et l’amour maternel existent. (Youssefi, 2009: 369)
Une troisième analyse de ce poème se trouve dans Recasting Persian Poetry de Karimi-Hakkak. Ce chercheur, en analysant les rapports intertextuels entre les trois versions, relève certains procédés stylistiques et linguistiques appliqués par le traducteur. Karimi-Hakkak trouve aussi que le poète iranien a bel et bien réussi à adapter le texte source aux conventions morales et religieuses de la société cible. Dans son analyse, il rappelle à juste titre la mentalité et le discours général de la société iranienne du début du XXe siècle où «la réforme littéraire se caractérisait notamment, entre autres, par une conception littéraire qui considérait l’emprunt à la littéraire étrangère comme une possibilité de féconder, dans certaines circonstances, la tradition et la richesse de l’art poétique persan». (Karimi-Hakkak, 2005: 299)
Sans négliger la valeur des analyses intéressantes des chercheurs mentionnés, nous sommes d’avis que l’origine de cet emprunt n’est ni le texte anonyme allemand ni la chanson de Richepin, car les deux origines invoquées revêtent peu d’affinités avec le poème d’Iraj Mirza. Comme nous l’avons évoqué, Irânšahr ne fournit pas la référence du texte source ni une explication sur leur choix, c'est pourquoi nous sommes encore confrontés à un emprunt pour lequel nous sommes privés de tout repère concret.
«Un cœur de mère»: un poème en dialecte lorrain
Dans notre recherche pour trouver le texte source plus probable que ceux que nous venons de mentionner, nous avons découvert un poème en dialecte lorrain intitulé «Un cœur de mère», qui se rapproche plus de «Qalb-e mâdar». Ce poème français est publié dans le quotidien bimensuel Le pays lorrain, sous la rubrique «Conte de la montagne», six ans avant la parution de la traduction d’Iraj dans la revue Irânšahr, c'est-à-dire en 1914. Nous citons ci-dessous la version originale et sa traduction signée par un certain J. Valentin:
Un cœur de mère
C’irre in’ paur’ boube, enne mahhe béïesse, Po vouer li suès, a virau lan; II irre setio, lo paure effant, Mais lé, elle iré mahhe comme enne vouèse. 5 «Viné dchî no, te s’rais me femme Te m’quenas, te sais que j’t’aime bîn’ Dje s’rai pu to vaula que t’n homme Et jamais dje n’te r’fuserai rin’ — Dje vouraille lo vouer po lo craire; 10 Ball’s premasses ne cota rin’; Epout’ me lo coeur de té mère Po lo botè queure è mo dchin’». Po pière è le béïesse maudite I toueu sè mère, lo malheureux. 15 I li pouteu lo coeur bin’ vite. Mais o corant, v’ià qu’i dchéheu. Et comme il irre en train de s’piande, Vala qu’il oïe o se r’Ievant Lo coeur de sè mère que li d’mande: 20 «Ousque t’es mau, dis, m’n effant?» |
C’étaient un pauvre garçon, une méchante fille Pour voir les pareils, on irait loin II était niais, le pauvre enfant Mais elle, elle était mauvaise comme une [guêpe. «Viens chez nous, tu seras ma femme, Tu me connais, tu sais que je t’aime bien Je serais plus ton valet que ton mari Et jamais je ne te refuserai rien. — Je voudrais le voir pour le croire; Belles promesses ne coûtent rien; Apporte-moi le cœur de ta mère Je le ferai cuire pour mon chien». Pour plaire à la fille maudite II tua sa mère, le malheureux II lui porta le cœur bien vite. Mais en courant, voilà qu’il tomba. Et comme il était en train de se plaindre, Voilà qu’il entend en se relevant Le cœur de sa mère qui lui demande: Où as-tu mal, dis, mon enfant?» J. VALENTIN. (Le pays lorrain, 1914: 51)
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Autant les quatre versions dont celle d’Irânšahr, celle de Richepin, celle de Valentin (version dialectale) et celle d’Iraj, se ressemblent par certains traits, autant elles sont dissemblables par d’autres. Pour analyser l’éventuelle origine de la traduction de Qalb-e mâdar d’Iraj Mirza, nous mettons en regard les quatre versions citées.
Un regard croisé sur les quatre textes
Les quatre textes portent tous sur le même sujet, pourtant certaines dissemblances les distinguent les uns des autres. Commençant par la traduction de Shabnam parue dans Irânšahr, dans cette version, la description de la scène ouvrante et le dialogue entre les deux personnages comprennent sept lignes sur les treize que compte l’ensemble de la traduction. Ce début n’apparaît dans aucun des autres textes. Cet ajout intensifie en effet l’aspect romanesque et romantique du récit. En outre, cette version se distingue des autres non seulement par sa forme en prose mais aussi par le fait que le narrateur ne se prononce nullement sur le caractère des personnages alors que dans les trois vers, on lit le jugement direct des poètes sur les personnages. Dans les deux versions françaises, le jugement apparaît d’emblée au début du texte. Dans la version dialectale, il est rendu à travers les adjectifs niais pour le garçon et méchante pour la fille alors que chez Richepin, le garçon est traité de pauv’gas et la fille n’est aucunement qualifiée. En revanche, dans la version d’Iraj, ce jugement se déplace vers le milieu du texte, exprimé dans les vers: L’amant insensé et déraisonnable//non, l’homme indigne et sans vergogne.
En ce qui concerne le comportement des personnages dans les textes ; la traductrice et le poète iraniens cherchent à forger des excuses pour le jeune homme et donc atténuent, dans leur version, l’atrocité de l’acte de l’amant. Chez Shabnam, c’est le soulèvement d’une tempête au fond de l’âme et du cœur qui met le jeune homme dans l’état de folie, mais chez Iraj Mirzâ, l’amant est ivre et intoxiqué d’opium, ce qui lui fait oublier le respect dû à sa mère. En revanche, dans la version dialectale, le poète, sans chercher des prétextes, attribue l’acte de l’amant à son destin fatal, qualifié de malheureux. À ce propos, Richepin se tait.
Quant à la différence entre la chanson de Richepin et les autres versions, c’est la phase préparatoire de l’histoire qui fait la distinction. Cette partie importante dans laquelle l’acte de l’amant est présenté comme la condition nécessaire pour que l’amour se réalise entre les amoureux, est complètement omise dans la chanson de Richepin, alors qu’elle constitue une partie majeure et essentielle dans les autres versions. Quant à cette séquence, dans la version dialectale, elle comprend 8 vers sur 20 (5-13); dans le poème d’Iraj, elle est rendue en 9 vers sur 18 (1-9); et dans la version de Shabnam, elle est incorporée au début descriptif de l’histoire. Comme il s’avère dans les textes, ladite séquence constitue l’élément essentiel qui régit la morale et le message de l’histoire. Son absence, dans la version de Richepin, pousse notre raisonnement pour exclure la version de Richepin comme origine éventuelle du poème d’Iraj Mirza.
Quelques écarts entre la version de Shabnam et celles d’Iraj Mirza et de Valentin nous permettent de supposer qu’Iraj Mirza, dans sa traduction, ne s’est pas basé seulement sur la version d’Irânšahr. Dans la version «Un cœur de mère» ainsi que dans «Qalb-e mâdar», l’histoire est déclenchée par le message d’un des membres du couple à l’autre: Viens chez nous, tu seras ma femme dans «Un cœur de mère» et La bien-aimée donna un message à son amant dans Qalb-e mâdar. Ce message, à partir duquel se développe le motif du texte, c'est-à-dire la rivalité et la jalousie entre l’amour de la bien-aimée et l’amour de la mère, disparaît dans le texte d’Irânšahr.
Comme il s’avère dans les poésies mentionnées, c’est en rapport avec ce motif que les poètes créent l’ambiance de l’histoire dans laquelle l’homme perd la raison et finit par commettre un crime. Sinon, il va de soi que la déclaration brutale d’un tel souhait, comme on le voit chez Richepin, pourrait ressembler à un désir matricide. Chez Iraj et dans la version dialectale, l’histoire débute en sorte que la fille essaie de manipuler les désirs et les sentiments du jeune homme. Cette ressemblance entre la base et l’ouverture d'«Un cœur de mère» et du poème d’Iraj Mirza nous confirme une fois de plus qu’Iraj a dû avoir accès, outre la version en prose, à la version française, d’autant plus que le poète avait une maîtrise parfaite de la langue de Molière. Nous connaissons la compétence linguistique d’Iraj Mirza en français et sa connaissance de la littérature française grâce aux autres traductions et aux emprunts qu’il fait de la langue française dans l’ensemble de son œuvre.
En ce qui concerne les différences entre «Un cœur de mère» et «Qalb-e mâdar», au niveau des stratégies de traduction appliquées par Iraj Mirza pour adapter le texte source à la culture et les conventions littéraires de la langue cible, il ne saurait être nullement question d’une adaptation structurelle du texte original car le poète iranien respecte fidèlement dans son texte les règles de la versification de tradition littéraire persane et ne montre aucun intérêt pour apporter des changements inédits dans sa composition. En effet, les particularités métriques et homophoniques de «Qalb-e mâdar» s’accordent parfaitement avec l’ordre d’aruz (le système de métrique persan).
Au sujet des variations du texte dans son passage de la langue source à la langue cible, contrairement à la version française, dans la version persane le message est envoyé par la femme à son amant. On pourrait motiver ce changement autant par la différence culturelle que par l’intention du poète iranien pour évoluer le rôle de la femme dans le déclenchement du conflit. Il va de soi que cela affecte la légitimité du geste de la femme vers son amoureux. En effet, dans la version française, l’amante aimerait mettre à l’épreuve les revendications de son amoureux, ce qui se traduit dans les expressions: Je voudrais le voir pour le croire ;// Belles promesses ne coûtent rien. Alors que chez Iraj, l’homme est implicitement présenté comme le fiancé à qui la fiancée veut rendre visite. Ici, ce n’est plus l’amant qui s’adresse à sa bien-aimée mais c’est elle qui se lamente auprès de son amoureux du comportement de sa belle-mère: «elle me chasse devant la maison». Ainsi les conditions dans lesquelles les personnages féminins sont impliqués changent dans les deux versions. L’une veut s’assurer de la bonne volonté de son amant et l’autre veut assurer sa vie amoureuse. Cette dernière commente ainsi sa demande: La douceur est amertume dans la vie pour nous deux // tant que ta cruelle mère est en vie.
On pourrait mettre ce changement en rapport avec la différence des normes culturelles dans les deux sociétés. Pour un lecteur iranien de l’époque, la visite d’un fiancé par une fiancée peut se comprendre alors que le rapport hors mariage entre les amants ne se justifie pas dans les mœurs des Iraniens. De plus, la condition imposée par la bien-aimée pourrait paraître un motif très indécent pour le lecteur iranien alors que la rivalité entre la belle-mère et la belle-fille, lui est bien familière et crédible. Iraj Mirza essaie donc de transformer légèrement l’histoire de sorte qu’elle convienne à l’horizon d’attente de son lecteur.
En effet, pour ennoblir le texte original des éléments sémantiques choquants pour la culture cible, le poète iranien procède à des adaptations qui affectent autant l’aspect effectif que narratif de l’histoire. Dans l’une des adaptations appliquées par le poète iranien, Iraj substitute le dessein de la méchante fille qui cherche à faire cuire le cœur de sa belle-mère pour son chien par un motif plus vraisemblable: «pour polir le miroir de mon cœur». Par cette substitution, le traducteur remplace une idée grossière par une expression métaphorique empruntée au registre mystique de la langue persane, ce qui fait changer superbement la portée sémantique du texte. Ainsi, avec ce nouveau motif, la motivation de la bien-aimée est de nettoyer le cœur des zengârs (des impuretés). Au sens figuré, cela signifie qu’elle voudrait purifier le cœur des aspérités et des méfaits provoqués d’ordinaire par des causes mondaines grâce aux rayons d'amour, notamment ceux de Dieu. (Anvari, 2003: 69)
Iraj Mirza recourt également au procédé d’omission et d'ajout dans sa traduction. L’image du chien comme animal najes (impur) dans la religion musulmane et son apposition à l’image de la mère, digne d’un très grand respect, pourrait logiquement paraître grossier et déplacé aux yeux du traducteur. Iraj Mirza supprime complètement ce passage dans sa traduction. Il supprime également l’adjectif déqualifiant maudite (dans la fille maudite) ou mauvaise comme une guêpe.
Ces suppressions sont compensées par un allongement du texte original de plusieurs vers dans lesquels Iraj évoque le caractère odieux de la femme. Il y a d’autres allongements; par exemple, dans la description du jeune homme, nous lisons: «L’amant insensé et déraisonnable // non, l’homme indigne et sans vergogne // Alors ivre et intoxiqué d’opium». Ou encore dans la description très émouvante de la dernière scène, on voit comment le traducteur essaie de renforcer l’aspect affectif du texte en ajoutant les interjections Âh (malheur à moi) et Âx (hélas).
D’ailleurs, l’ensemble de ces procédés s’accomplit dans un langage plein de mots et d’expressions appartenant au registre lyrique persan: ‘šeq (amoureux), ma’šuq (la bien-aimée/ amoureuse), del-e nâzok (cœur fragile), sang-del (cœur de pierre), yek-del (sincère), yek-rang (franc, honnête), vesâl (union), ce qui donne lieu à un emprunt brillant dans lequel tous les signes du texte original ont pratiquement disparu.
Avec ces procédés d’ennoblissement, Iraj Mirzâ forgeant un motif décent pour l’histoire, apporte une grande modification au texte source et réussit à l’adapter aux attentes de la société cible dans un parfait respect des conventions sociales et littéraires. En modifiant complètement le système original ainsi que les détails de l’histoire, Iraj Mirza réussit à persaniser le texte étranger. En effet, il le recrée et en fait presque une nouvelle poésie en pleine conformité avec la tradition poétique du son pays.
Conclusion
Comme nous avons évoqué, la revue Irânšahr aspirait la modernisation de la poésie persane et pour atteindre ce but, elle cherchait, via la présentation et la traduction des œuvres littéraires européennes, à inspirer l’âme de la littérature dite «moderne» dans le corps de la poésie persane. Vu les stratégies employées par le traducteur dans la recréation de «Qalb-e mâdâr», on ne saurait considérer ce texte, pour des raisons diverses, comme un exemple réussit de la modernisation de la poésie persane ; tout d’abord parce que les textes sources étant de littérature folklorique ne sont pas représentants de la littérature moderne française. Deuxièmement, les textes originaux sont dépourvus de grandes valeurs poétiques et stylistiques, ce qui ne nous permettra pas de mesurer la compétence d’Iraj Mirzâ dans la traduction des textes étrangers de grandes valeurs poétiques.
Pourtant, il faut saluer le traducteur pour la qualité indéniable de sa traduction dont les valeurs poétiques ne laissent pas de doute en ce qui concerne la conformité de son texte aux conventions littéraires et culturelles de la société d’accueil. En outre, pour combler les qualités manquant aux textes de départ, Iraj Mirzâ recourt à différents procédés d’adaptation : la suppression, l’adjonction et la substitution. En outre, dans un respect total des règles prosodiques d’aruz persan, il réussit à adapter le texte source aux attentes du lecteur iranien. Ainsi, Iraj Mirza réussit à ennoblir un texte d’une valeur poétique relativement modeste et en faire un texte brillant. Il n’est pas insensé de considérer le résultat de cette traduction plutôt comme une iranisation totale du texte étranger que comme un essai de modernisation poétique.
[1] À ce propos, la revue présente Voltaire, Victor Hugo et Gustave Le Bon. À propos de ce dernier, Kazemzadeh précise qu’il a eu l’intention de traduire Aphorismes du temps présent, mais qu’il a changé d’avis suite à son entretien avec l’auteur qui lui a conseillé de traduire Les opinions et les croyances. Irânšahr (troisième année), 1985 : 96-106.
[2] Dans cette étude, Abas-Eghbal Ashtiani profite d’une manière considérable de trois sources universitaires françaises de l’époque: Histoire du monde depuis sa création jusqu’à nos jours de Charles de Riancey; Cours de Littérature de Jean-François de la Harpe ; Histoire du monde depuis sa création jusqu'à nos jours d’Henri et Charles de Riancey; Histoire des littératures comparées de Frédéric Loliée. (À ce propos voir (Issaiyan, 2014: 197-198).
[3] Pour cette biographie, nous avons eu recours aux ouvrages suivants: Mahjoub, 2002: 20-40); (Aryanpour, vol. II, 1993 :383-419; Miransari 1997: 520-523.